PLAIDOYER A L'EGARD DE LA PATIENCE
Naguère j'ai vécu impatiemment. J'étais dans le tout tout-de-suite, dans le beaucoup beaucoup-trop, dans l'excès total, impertinente et exigeante dans mes désirs multiples démultipliés, foisonnants dans une cacophonie assourdissante, incapable de choisir ce qui m'importait le plus ; piétinant le désir des autres, je piétinais mon propre plaisir, sans même en avoir conscience.
J'ai vécu longtemps ainsi, exigeant beaucoup des autres et sans délai, forte de l'idée que, moi j'offrais beaucoup. Je croyais qu'offrir beaucoup suffisait pour exiger et soumettre les autres à mes désirs. J'offrais trop et trop vite, comme si j'allais mourir d'une minute à l'autre. Mais ça ne m'est pas arrivé. Pas encore.
Qui suis-je pour exiger qu'on m'écoute et qu'on me réponde au doigt et à l'oeil?
Qui suis-je pour exprimer d'une impatiente âpreté mon désir assoiffé de communiquer ?
Est-ce que la maladie légitimise tous les empressements et toutes les exigences ?
Peut-on donner préférence au délai de réponse plutôt qu'à la réponse elle-même dans ce qu'elle a d'extrêmement précieux ?
Récemment, une amitié inhabituelle à peine naissante et si fragile vite et si bêtement agressée m'a appris la patience.
J'étais un éléphant, barrissant gaîment vers tous mes congénères, les piétinant en m'excusant de prendre autant de place, comme si ce n'était pas grave.
Je ne suis plus un éléphant. Je ne sais pas qui je suis, pas encore. Je me regarde et j'hésite. J'ai tant changé et je change tant encore... J e regarde le bizarre cocon qui se tortille sans savoir comment faire.
Patience. J'apprends la patience, j'essaie de m'appliquer. Pas pour me faire pardonner. Ce qui est défait ne se refera pas, il me faudra espérer d'autres rencontres, ciselées au ciseau de la patience.
Je sais qu'on me regarde mais qu'on ne fait pas que cela. La vie étreint chacun de priorités. Mais je ne sais pas grand chose parfois. Sauf donner mon sourire et tendre ma main.
Je garde comme autant de précieux joyaux mes joies, mon rire d'enfant, mes bonheurs artistiques, quelques amours, quelques amitiés, des fugaces, des persistantes,des qui s'effritent, d'autres qui grandissent, patiemment. Ils ne voient de moi que ce que je montre, ils ne savent pas plus que moi qui je suis.
Je tiens peut-être plutôt du caméléon qui s'adapte le plus souvent à tout, non sans en souffrir parfois, mais qui au fond n'est jamais lui-même.
Ne serai-je donc jamais moi-même, ne parvenant à savoir ce qu'il y a au fond, au plus profond de moi-même ?
A suivre, peut-être
Cathecrit, le 24 septembre 2007