15-10-07
Pas loin de Bénarès, à l'est, se trouve Bodhgaya, le lieu où le Bouddha parvint à l'illumination, seul, abandonné par ses compagnons sanyasins qui étaient partis à Bénarès.
Il décida alors de partir à leur recherche pour leur expliquer ce qu'il venait de comprendre, et les rattrapa à Sarnath, petite bourgade à 10 km au nord-est de Bénarès.
C'est là qu'il leur révéla la voie du milieu, dans un parc peuplé de cerfs.
Suite à ce célèbre premier sermon, qui convertit ses anciens compagnons en disciples, il commença à parcourir en leur compagnie la région, convertissant à sa doctrine de nombreuses personnes, notamment des gens importants chez qui il pouvait être introduit grâce à son sang royal (s'il n'avait pas été fils de roi, sa doctrine n'aurait donc certainement pas eu autant de succès, étrange que personne ne le reconnaisse franchement).
Plus d'un siècle plus tard, c'est surtout grâce à la conversion d'un autre roi, un des premiers empereurs d'Inde, que le bouddhisme fut vraiment à l'honneur et fit suffisamment d'adeptes pour perdurer jusqu'à aujourd'hui.
Il est à ce propos intéressant de noter quelques parallèles entre bouddhisme et christianisme, si vous permettez une digression :
- Siddharta Gautama, né hindou et initié aux veda et au brahmanisme, crée un courant de pensée complètement dissident à cette religion de référence, qui sera répandu grâce à l'empereur Ashoka qui s'y est converti. Ce courant de pensée qui n'était que sectaire au départ sera déformé, dogmatisé, et transformé en religion.
- Jesus, né juif et initié au judaïsme, crée un courant de pensée complètement dissident à cette religion de référence, qui sera répandu grâce aux romains, notamment et définitivement par l'empereur Constantin qui s'y est converti. Ce courant de pensée qui n'était que sectaire au départ sera déformé, dogmatisé, et imposé comme religion.
Bref, pour revenir à notre empereur Ashoka, de la dynastie des Maurya, il dirigeait alors une Inde récemment unifiée, dont le territoire n'était pas très éloigné de l'Inde actuelle, et fit tout ce qu'il put pour faire la promotion de cette doctrine extraordinaire, plus séduisante que le brahmanisme (futur hindouïsme) rigide du IIIe siècle avant JC. Il fit ériger des stupa et des colonnes gravées à cet effet sur le territoire de son empire.
Etant à dix kilomètres, nous avons décidé d'aller visiter Sarnath, qui est devenu un des sanctuaires les plus importants du bouddhisme, et voir l'immense et célèbre stupa.
Renseignements pris, nous savons que le moyen le plus pratique, enfin disons économique, est de se rendre pas loin du quartier musulman, Benhyabad, où des motos-rickshaws partent pour Sarnath, pour 80 à 100 Roupies.
Nous y allons à pied, ce qui nous fait une bonne promenade, et passons devant la grande mosquée orange et or au long minaret d'où proviennent les chants matinaux des muezzins. Nous y voyons aussi d'horribles boucheries où les cadavres écorchés d'agneaux pendent dans des nuages de mouches, leurs têtes posées et alignées en dessous. De quoi devenir végétariens ! On comprend les hindous !
Finalement nous arrivons en vue des rickshaws, et comme une nuée de mouches justement, plusieurs chauffeurs viennent presque se battre pour nous amener à Sarnath.
Ce qui est pratique, c'est que quelques moues douteuses suffisent à faire jouer la concurrence entre eux, et que nous obtenons enfin le trajet au tarif record de 60 Rs pour deux ! Le chauffeur qui a émis une proposition aussi bradée se fait prendre à parti par les autres. Sans hésiter, je monte dans son engin et enjoins Carole à m'imiter rapidement. Le chauffeur se dégage, monte à son tour, démarre, et notre départ ressemble à une fuite, sous les invectives des autres chauffeurs en colère.
Sortir de Bénarès, longer le Cantonnement (ancien quartier riche des colons anglais), traverser la banlieue nord, et se taper la route chaotique jusqu'à Sarnath n'est pas de tout repos. Ces rickshaws ne sont pas équipés des meilleures suspensions. Vingt minutes, en comptant la pause essence.
J'ai pris quelques photos à la volée sur le chemin :
En rickshaw : le chauffeur......et nous A Sarnath, nous allons visiter le fameux parc aux cerfs, nous voyons le stupa haut de 100 mètres, et l'endroit où le Bouddha fit son premier sermon (statues à l'appui), puis le temple principal.
Quelques occidentaux qui viennent là pour méditer, bien en vue, genre "j'ai médité à Sarnath".
L'ambiance (peu propice à la méditation je trouve) et ces gens-là m'inspirent d'emblée une certaine déception, teintée d'amusement amer.
(photo par Carole) L'ambiance, c'est surtout des enfants et des adultes qui nous collent aux basques comme des sangsues pour mendier ou nous vendre des petits bouddhas en résine, de la poudre colorée, des cartes postales, des poupées miniatures, ou n'importe quoi d'ailleurs.
Impossible de s'en débarrasser pacifiquement, il faut carrément les jeter avec violence pour espérer avoir une chance de s'en défaire, et encore (en effet ils jouent sur le fait qu'ici tout le monde se la joue sage pacifique sur le chemin de la voie open-shakra-peace and love).
Heureusement, je sais dire en hindi :"fous le camp", "dégage", "je t'ai dit qu'on n'en veut pas", "lâche-moi sinon...", etc...
Bref nous ne visiterons pas le temple, où même la location d'un espace pour laisser les chaussures à l'entrée est payant, et où un comité d'accueil du même ordre attend juste à l'entrée, mais nous arpenterons de long en large le parc, admirons les cerfs, les oiseaux (dont certains sont bien comiques, voir ci-dessous) et les crocodiles, puis fuyons enfin la nuée de mendiants touristophiles.
En ressortant, nous apercevrons une clairière où nous avions vu en entrant une vingtaine de moines bouddhistes dans leur robe orange de lamas s'installer pour un pique-nique.
Une heure après, l'herbe à cet endroit est jonchée d'ordures, de bouteilles en plastique et emballages divers... hum.
Une fois ce petit tour touristique accompli, que reste-t-il à faire à Sarnath ?
Deux solutions : visiter les divers autres temples bouddhistes de la région, loin du centre (les temples chinois, japonais, israélien, américain, etc...), ou bien : rien !
Nous optons pour la deuxième solution et décidons d'aller saluer John, un ami de Pinto que ce dernier nous a chaudement recommandé et qui tient le Golden Bouddha Hotel.
Un cavalier que nous avons croisé à la sortie de Sarnath3 générations réunies autour du gagne-pain de la famille : un rickshaw-tricycleNous sommes passés devant le Tibetan Institute et sa belle entrée Nous passons une heure et 2 ou 3 km de marche dans tous les sens pour trouver l'hôtel qui est en fait en dehors de Sarnath et mal indiqué. Nous sommes affamés et assoiffés, mais l'hôtel ne fait pas restaurant. Heureusement John et sa délicieuse femme Seema sont adorables et Seema nous prépare un sandwich et une omelette, avec du thé.
Nous discutons...
John nous explique que le tournage d'un film Bollywood a lieu ces jours-ci dans son hôtel, puis nous parlons de la France. Associé à la France, un nom incontournable et plutôt bien perçu : Sarkozy !
Dès que nous les quittons, nous trouvons par chance un moto-rickshaw qui nous propose le retour pour 80 Rs, et nous rentrons sans regret.
Il faut dire qu'à Sarnath, rien n'est vraiment authentique de l'époque du Bouddha, tout ayant été profané et détruit par les musulmans au moyen-âge. Tout ce que nous avons vu est aménagé" depuis 1835, et encore ce sont des distractions proposées aux touristes pour qu'ils aient quelque chose à se mettre sous l'objectif.
Bref nous sommes déçus.
Je pense qu'il faut être bouddhiste pour vraiment apprécier symboliquement le séjour.
De retour au quartier Benhyabad, nous allons au carrefour de Gaudolia où se trouve l'église chrétienne St Thomas, et nous prenons un rickshaw-tricycle, pour le fun !
Nous allons au rendez-vous qu'Amit Bhaiyalal nous avait fixé, pour qu'il me livre enfin le surbahar avec sa caisse.
Surprise : la caisse est elle-même très lourde et plus grande que nécessaire. J'ai peur que le tout dépasse les 20 kg autorisés par la compagnie aérienne.
Nous allons à côté, chez une sorte de ferrailleur, qui possède une énorme balance à poids en fonte ; verdict : 16 kg et des poussières. Ouf ! Mais l'ensemble n'est tout de même pas facile à ramener d'une main à l'hôtel... sa taille : 1m77 !
Amit nous invite à manger demain soir, nous acceptons.
Retour à l'hôtel, fourbus, en passant par les bords du Gange et son ambiance particulière.