Transferroviaire: Relativité

POESIE DU TRANSFERROVIAIRE VI)

RELATIVITE

Par la fenêtre, le temps défile
Voyage long, au cours des ères…

Les marais pensent en millénaires,
Dans l’athanor des eaux lentes.
Glissant, à peine frémissantes
Vers les rivages mouvants.
Ils distillent les forêts, pressant les fûts morts
Aux vendanges fertiles des humus.
Couches après couches, se construit l’écorce
Jusqu’au pur diamant, essence de matière…

Les forêts pensent en siècles,
Nourries par les marais,
Dont les antiques feuillages créent la fertilité.
L’Arbre Monde dressé à l’orée des légendes,
Voit grandir tous ses frères en traits d’union cosmiques.
Et les haches d’essart taillent des coupes sombres,
Au mitan des futaies pour des espaces humains.
Le bois sera charpente et pieux pour les clôtures…

Les champs pensent en années,
Assolement ; des blés pour le froment.
La terre toujours forcée, labourée, engraissée.
Le trèfle et le sainfoin régalent les troupeaux.
La jachère attendue, repos bien mérité.
Le labeur des campagnes est la respiration
Des saisons qui se coulent au profond des prairies.
Mais l’homme s’impatiente et le sol s’affadit…

La ville pense en secondes,
Sans compter les suivantes.
Vite, sans savoir pourquoi,
Construire toujours plus haut,
Plus rapides les voies et la pierre s’étouffe
Des nuées oxydant les murs et les regards.
L’urbain dévore le champ, et le champ la forêt,
Le creuset des marais asséché de son sens…

Par la fenêtre, le temps s’emmêle
Voyage éclair, le temps n’a plus le temps…