Ce qui n’est pas dans le procès-verbal

Ce qui n’est pas dans le procès-verbal





A Marek

Par exemple la cigarette. Il se peut
qu’il l’ait allumée. Sur le banc
ou sous un arbre – une nuit d’été
il est agréable de se balancer, si insouciamment,
sur la bordure du trottoir. Cricri des grillons
et chuchotements tardifs. On peut
encore autrement - qu’il l’ait éteinte à moitié
(après tout qu’il ait voulu arrêter). Il aurait pu
éteindre au milieu. Ou tout simplement
fumer plus lentement. Ou plus vite. Ou d’une façon
différente. S’il avait perdu la clé, trébuché
quelque part dans l’escalier, pris un coup dans la figure,
perdu la tête pour une pute – il serait
à 22 :18 quelque part ailleurs.

Toujours très étrange, mais encore en prise avec les détails qui font la réalité, sur toutes ces petites choses qui génèrent le hasard, la fatalité.
J'ai été néanmoins un peu gênée par la présentation du texte : as-tu choisi les coupures ou c'est l'ordinateur qui les a rendues de cette façon ?

En réponse à ta question, chère Constance : C’est un
choix très réfléchi et travaillé pour
donner une forme telle quelle à ce poème, et pas que celui-ci. Le jeu
avec le sens est très fréquent chez Isabelle, comme l’enjambement qu’elle
maitrise aisément : le mot final ou ce de début du
vers appartient aux deux vers – précédent et suivant, pour donner la
possibilité de lire ses phrases de différentes manières et sortir également le
double sens. J'envie sa facilité avec laquelle elle tisse ses poèmes, restant pourtant très attachée aux détails enregistrés par l’œil du témoin et du reporter des faits divers.
Cordialement Solweig

On dirait que Marek s'est consumé avec le feu. On dirait, pour ne pas penser à pire(pyromanie?) qu'une simple cigarette mal éteinte a provoqué le drame. On dirait que cela aurait pu se passer autrement et que Marek, mon beau Marek pourrait être encore là, près de moi...je passerais bien ma vie à imaginer tout ce qui aurait pu empêcher le pire parce que sans Marek, là, la vie est amputée et la gangraine me gagne.
Cette manière d'écrire, suggestive, elliptique, est un chemin pour la rêverie.
Je pense quand même que la forme pourrait être encore travaillée. Par exemple, j'aurais écrit: "il est si agréable de se balancer, insouciemment, sur le bord du trottoir" pour donner un rythme plus "balancé" justement. Amicalement, Geho.

Je pense quand même que la forme pourrait être
encore travaillée. Par exemple, j'aurais écrit: "il est si agréable de
se balancer, insouciemment, sur le bord du trottoir" pour donner un
rythme plus "balancé" justement. Amicalement, Geho.

Geho, ce ne peut être que de ma faute mais j’ai voulu être très
fidèle à l’auteur dans ma traduction.
Il y a une différence entre « si agréable » et « si
insouciamment » dans ce contexte, où « si » souligne « l’insouciance »
et pas « le plaisir. »
Cela pourrait ne pas plaire.
J’essaie quand même de défendre ce poème.
Cordialement Solweig

oui, tu as sans doute raison, Solweig: je voulais défendre la forme quand toi tu vois bien le sens que cela prenait dans la langue originale. Défends, défends, ma chère. Cela m'aide à mieux comprendre encore.
Mais confirme moi qu'il s'agit bien d'un texte écrit d'après un fait divers.