C’est ainsi qu’un masque de doigts…
Il commence par un effleurement. Une caresse, lente et longue.
C’est ainsi que ses paumes tièdes et ses doigts fluides découvrent, longuement, lentement, des tensions, cachées loin à l’intérieur, derrière des buissons épineux où s’entremêlent les fatigues d’avant, des "circonvolutes" cornéliennes semblant inextricables.
Leur dénouement commence par la course douce des empreintes des majeurs sur le front, par leur survolée anodine des tempes, par une toute légère pression des pouces, sans saccade, jusque sous l’arcade des sourcils, puis sur les cernes encore éveillés, par un va-et-vient presque sensuel sur les ailes du nez.
C’est par une essuyée des humeurs labiales que ses index mesurent le délassement des commissures.
C’est par un serrement tout à fait indolore du menton, entre les pouces et les index que finit la caresse.
Elle, elle commence par un délassement, par un abandon de visage, lent et long !
C’est ainsi que ses pommettes se décrispent, que son front se déride, que ses sourcils se défroncent, sous la soie sans épines des paumes ouvertes, sous les silencieux dessins invisibles des doigts, massant à découvert le calme d’aujourd’hui, revenu au grand jour sous les phalanges dénouées. C’est ainsi que ses cils reposent leur noirceur sur la cime blanche de ses joues, que ses paupières closes cessent leur imperceptible tremblement, que ses cernes disparaissent peu à peu par l’enchantement produit à l’intérieur, perçant la peau jusqu’aux bouts des ongles.
C’est ainsi que ses pommettes ne saillent plus et que les ailes de son nez s’ouvrent au calme de sa respiration.
C’est ainsi que ses lèvres sans voix voudraient exprimer leur "deshonte" pour cet abandon-là, mais ne le peuvent point, endormies par cette "démoiteur", soudaine et délicieuse.
C’est ainsi que, dans le serrement des quatre doigts, son menton oublie les "pointements" anciens.
Il poursuit par un masque tiède des mains long et immobile …
C’est ainsi qu’il adresse à leur intérieur, le message tiède et bienfaisant du massage. Il poursuit par un "englobement" phalangien des oreilles, endurcies par la lassitude des mots vains et des écoutes inutiles.
C’est ainsi que les cartilages n’ont plus d’âge et que les lobes, détendus, presque lascifs, lentement s’apprêtent à recevoir de nouveau les paroles-carats, les rires-boucles, les mots-rivières.
Il finit par un dernier masque de paumes et de doigts, léger, du front aux joues, voluptueux, des sourcils au menton, une sculpture du bien-être presque intactile.
Elle poursuit sa quête de paix par un fermement d’yeux, plus profond, plus long, plus immobile…
C’est ainsi que, les lèvres coites entre les deux rives des paumes et les coquillages de peau, prêts pour leurs vagues de mots, elle se laisse gagner par un paisible et confiant assoupissement…
Le masque des doigts se retire.
C’est ainsi qu’au-dessus des plages du visage immobile, il ressent encore à l’intérieur de ses mains la houle de la vie redonnée, avant naufragée au tréfonds…
Il finit par le plaisir indicible d’offrir le bien-être et par le bonheur silencieux de recevoir ce par quoi elle finit…
Elle, elle finit par un sourire...
gepetto