Les splendeurs de l’altitude se méritent, pas à pas, le souffle court sur des sentiers debout.
A la première cluse un lac sombre et profond où plonge une cascade, écheveau blanc qui déroule incessant.
A la seconde l’eau est bleue où des gardiens de roche se mirent étonnés de leurs chapeaux cotonneux dont le vent déchire les plumes. Les chevaux sauvages paissent autour, crinières en oriflammes blondes au milieu des aconits, casques bleus vénéneux qu’ils ne touchent pas.
Pour fermer la troisième, un cachalot de granit rose s’est répandu en travers de la vallée, langue de magma figé qui garde la bauge d’un glacier perdu. Les neiges fondues y accumulent leurs larmes froides après avoir sillonné des joues de roche dure où leurs flots immémoriaux ont creusé des vasques alternées. L’eau qui en jaillit nourrie des minéraux s’enfle d’une énergie incomparable que la science a rendue palpable et de tout temps, les habitants d’ici se sont portés mieux que dans la plaine.
Nous ne franchirons pas le quatrième verrou vers le lac glacé. Il est tard et avant le soir, la montagne s’enveloppe d’un manteau vaporeux.
Le rideau se ferme. Il faudra seulement imaginer le dernier cirque aux pierres chaotiques qui s’égrènent des remparts cristallins. Des chevaliers en armures grises, pétrifiés, regardent à leurs pieds les névés qui s’attardent au spectacle du minéral autour d’un dernier lac lisse. Bientôt le miroir des étoiles viendra donner des bleus purs pointés d’or à ce monde immobile, désert et silencieux quand le dernier vent aura cessé de siffler au contour des arêtes.
La nuit pourra se jouer égale et différente, dans la sidération d’un grain de poussière chaud, les yeux ébahis, prenant la distance entre l’infime et l’infini.