Parce que le bruit des vagues influe sur le reflux de l’âme, la côte Normande est comme un petit paradis du mot perdu. Le mot humide que pleure le ciel des absences sans douleur, le mot qui prend son temps en marge des habitudes urbaines.
On y pense surtout sans y penser parce que d’autres êtres en quête de reconnaissance littéraire se sont cherchés sinon des excuses, au moins des raisons.
Le prétexte du calme maritime hors saison propice à l’épanchement des mots.
Finalement, seul importe d’écrire en musique, quelque soit le lieu. Du moment que le mot vit quelque part, tout semble permis à qui croit bon se justifier.
Ne plus écrire, et respirer seulement l’écume, celle des jours que l’on vit simplement sans lecture.
Loin des cieux céruléens.
Loin des averses.
Loin du temps capricieux où le vague à l’âme s’échoue lamentablement entre deux moules moqueuses d’une pomme de terre anorexique malgré elle.
Gardez la frite, j’épluche vos désirs et noie les miens dans l’amertume d’une bière sans nom.
Carte postale d’un timbré.
Photo de vacances.
L’errance n’existe plus.
C’est l’heure indulgente où les lendemains n’ont plus d’aigreur, où les mots jouent à faire des phrases.
L’heure où le calme gagne la rive pour y ensevelir le doute, mais plutôt que l’absence, l’être humain valide sa présence, pesante.
C’est pourtant vrai qu’on a tous notre connard quelque part.
Quand on est un homme il est plus facile à trouver, jamais trop loin, quelques regards en dedans suffisent à mettre la pensée dessus, passant la main à celles qui pensent y avoir échappé.
Je suis mon propre connard, le mieux placé pour en parler, gourou d’une secte sans adepte.
Je suis mon propre connard, et ça ne change rien d’avoir mis le doigt dessus. Pourtant mes plus fidèles maîtresses sauront vous dire mieux que moi tout le pouvoir d’un seul doigt, mais je les bâillonne sans scrupule depuis toujours, connard l’on est, connard l’on reste.
En bon connard qui se respecte, je prends un malin plaisir à me promener dans Paris des liasses de billets dans les poches. Passant à la barbe puante des clodos, je poursuis mon chemin comme on se promène sur la plage, non, je n’ai pas de pièce, désolé de tant de futilité, désolé de tant d’audace, je suis un connard qui se respecte, je traite les femmes de bonnasses et leur mets des mains au cul… Quand les décolletés me sont interdits.
Je prends le métro parisien, ligne 5, je suis le seul blanc qui s’agrippe à la barre, je suis chez moi.
C’est pourtant vrai qu’ils puent ces saloperies de négros.
Sauf que ça m’a échappé vraiment, l’écho de mes aigreurs résonne encore dans la rame.
Tous les regards se tournent vers moi, sans décolleté, sans douceur, sans écume, sans aigreur.
- Qu’est-ce que tu viens de dire, connard ?
Putain… ils m’ont reconnu…