L'orange

l’orange


nous pelions des écorces d'orange
sous un grand soleil noir
et creux comme la nuit
notre ciel de lit s'appelait bazar
et chacun retourné croyait
l'autre être lui
est-ce cela l'amour
s'abstraire comme se fondre
en une seule étincelle brillante comme l'aurore
être à ce point bercé
de nos luttes fécondes
et croire l'un dans l'autre à jamais
à l'abri
quand le ciel cillait d'une lueur étrange
pourpres et solitaires
meurtriers de l'ennui
nous roulions sous nos rires
une sourde faconde
blanche
veule
rabougrie
qui nous ensevelit

est-ce cela l'amour
cette lueur
sans vie

Quel étrange poème, si plein des beautés de l'amour au début, mais avec une bizarre impression de malaise, conclue par une dernière strophe bien pessimiste.
J'apprécie la façon dont tu t'exprimes, même sans être d'accord forcément sur ce que tu dis.

L'amour fusionnel est sans issue ? C'est ça qu'il faut comprendre ?

Si c'est ça, c'est un vaste débat.

Quoiqu'il en soit, il y a dans ton texte une revendication à la conscience froide, une sorte de lucidité qui s'impose.

J'aime beaucoup le travail des rimes et le rythme.

Sauge

J'adore ce poème!
Ca fout un peu la trouille, quand même...

Magnifique ! Je te découvre par ces vers qui se pèlent
comme une orange, de plus en plus finement. Jusqu’au cœur….étrangement amer.


Cordialement Solweig

Comme Solweig, je goûte à cette écriture ciselant tes pensées remarquablement.
Sans amertume, pourtant: le fusionnel c'est le bien-être du liquide amniotique... la phase 'construction' de l'amour.
Il faut le laisser naître!, remplacer petit à petit 'être' par 'exister', l'état par l'intelligence constructive.

merci, Véronique
Mick

Je ne regrette pas ma première lecture d'un texte de toi. Les mots choisis avec grand soin, des images fortes qu'on sent venir du fond fin fond, puissantes et douces à la fois, et la particularité que tout le monde oublie souvent : tout et son contraire, réunis là en un point central.

Une oeuvre courte et complète, joliment construite de fond et de forme.

L'amour est la lueur de la vie! Juste mordre une orange et s'enivrer de son jus, juste un instant intense vécu! Juste accepter qu'il n'est pas eternel, mais si quelque part, dans le vécu d'instant de boire un jus d'orange!
Prenant et interpellant ce poéme!