Le mensonge est une douleur à tous ceux qui écrivent plus qu’ils ne respirent.
Le déni de mensonge est une petite mort.
Le jugement, dernier.
Respirer ne demande rien à l’autre, tant que la douleur n’y fait pas surface.
La respiration d’autrui ne doit jamais être jugée, elle ne l’est jamais du reste. Chacun ne juge jamais que d’un être humain tapi derrière des mots, sans prendre conscience du pouvoir omniscient du langage, sans prendre conscience du pouvoir négligent du jugement.
Jour après jour, je respire… et je grandis de mes faiblesses, pensant parfois qu’une justification suffit à tromper le mot. Je me trompe pourtant moi-même, et peu m’importe la conclusion, peu m’importe l’introduction, peu m’importent ces avis divergents qui n’ont jamais qu’un sens sans plus de direction.
M’importent seulement les liens entre les choses, dans cet univers virtuel où chaque lecteur vient se noyer, pensant chaque fois sortir de l’eau.
Avancer sans en avoir conscience, voilà le propre du poisson rouge.
Avoir conscience sans avancer, voilà le propre du plancton.
Bouffer du mot jusqu’à la sève, sans entrevoir la nécessité, pour percer enfin tous les spores du monde et ne jamais rien regretter, loin du tumulte incessant des bruyants insipides, bouffer du mot sans ponctuation, sans règle et sans défi, sans savoir, sans utopie, bouffer du mot pour se nourrir et s’écarter un peu du moule…
Je bouffe le mot et je dégueule les phrases.
Moule frites, si possible.
A vous de décider si je dois dévorer une partie de vous, ou vous gerber dessus ce qu’il pourrait rester. A la crudité du propos, j’ajoute mon mépris de la respiration et la douceur des embruns stellaires, drôle de mélange en vérité je vous l’accorde, mais le monde est ainsi fait de ces tapages doux-amers, sucré-salé quand tu nous tiens, le monde est ainsi fait qu’on ne contrôle jamais rien, que le mot s’imprime au bout d’un index ou au coin de l’œil, nous ne sommes qu’une entité sournoise de matière qui s’essaye vainement au plaisir.
On n’écrit jamais pour se sauver, mais pour voir à quel point l’on est perdu.
La répétition est la seule vérité du monde.
La redondance son seul plaisir.
La récurrence une souffrance commune.
Mais tant que la souffrance grandit, voir à quel point l’on est perdu est impossible.
Alors l’écriture se poursuit.
Elle ne perd rien pour attendre, à sa bouffer la queue à l’ombre sournoise des gueux.