03/04/10
LA FANTASY I)
I) DEFINITION
Qu’appelle t-on Fantasy exactement ?
Le genre, longtemps traité comme un sous produit de la Science Fiction, elle-même considérée comme une sous littérature, ne s’en dégage vraiment que dans les années 50 avec la publication du Seigneur des Anneaux (1954/1955) qui devient son archétype de référence, bien qu’il ne soit pas le premier.
SF et Fantasy sont toutes deux des littératures de l’imaginaire (parfois écrites par les mêmes auteurs), mais si elles font toute deux appel au merveilleux, elles ne fonctionnent pas sur la même logique.
Dans son acception actuelle, le terme « Fantasy » serait apparu aux Etats-Unis avec la revue « the magazine of Fantasy en 1949. D’abord limité au domaine littéraire il s’est étendu aux arts picturaux, au cinéma, aux jeux.
Pour l’écrivain et éditeur André François Ruaud, la Fantasy peut être considérée comme un sous genre du fantastique.
« La Fantasy est une littérature fantastique incorporant dans son récit un élément d’irrationnel qui n’est pas traité seulement de manière horrifique, elle présente généralement un aspect mythique et est souvent incarnée par l’irruption ou l’utilisation de la magie. »
A l’inverse, la chercheuse Anne besson, qui s’appuie sur la tradition littéraire française distinguant merveilleux et fantastique, la Fantasy est une incarnation moderne et un prolongement du genre littéraire du merveilleux, et n’est en aucun cas un sous genre littéraire du fantastique (position que je soutiens). En effet, ce dernier se définit comme l’intrusion du surnaturel dans un cadre réaliste, autrement dit, l’apparition de faits inexpliqués et inexplicables dans un contexte connu du lecteur.
Dans la Fantasy, la magie ne pose pas question et les univers « surnaturels » sont acceptés comme naturels et rationnels par le lecteur.
Le roman de Fantasy serait alors une sorte de conte merveilleux.
« La Science Fiction et la Fantasy font toute deux appel à un merveilleux, qu’il soit scientifique ou magique, que l’on appelle pour la SF « the sens of wonder » (wonder signifiant merveilleux en anglais). Pourtant les deux genres sont différents, à quoi tient une telle distinction ?
A première vue, la SF semble traiter de mondes futurs ou assimilés tacitement à notre futur, tandis que la Fantasy fait référence à une période technologiquement plus ancienne, voire sans technologie, et à des œuvres passé, adoptant généralement une esthétique médiévale ou antique. Beaucoup qualifient également la SF de littérature rationnelle alors que la Fantasy ferait appel à l’irrationnel et à la pensée magique. Certains insistent sur le fait que les vaisseaux spatiaux avec leur rayon laser ont la même fonction que les dragons crachant du feu et que la différence ne serait qu’une question d’habillage…
On peut établir une première différence d’ordre logique dans la manière dont sont présentés les éléments de merveilleux qu’on rencontre.
Les univers de SF répondent plutôt à ce qu’on peut appeler la logique de l’appareil, en ce sens que les phénomènes merveilleux mis en scène sont maîtrisables, maîtrisés et de ce fait enseignables donc infiniment reproductibles. Ces merveilles ne sont pas l’effet d’un don divin mais d’une maîtrise toute humaine d’ordre technologique et scientifique…
A l’inverse, les merveilles des univers de Fantasy relèvent de la transcendance : elles ne sont pas maîtrisées par un savoir humain et relèvent de l’inexplicable. De ce fait elles sont condamnées à n’être ni reproduites ni enseignées. Elles appartiennent au domaine du don, don du divin, du destin ou du hasard, et sont sacralisées dans leur typographie par une majuscule.
C’est cette logique de la transcendance qui fait de la Fantasy un genre relevant de la pensée magique ou de l’irrationnel.
Le héros de SF semble toujours vouloir changer le monde, et y parviens. Le héros de Fantasy au contraire semble vouloir le conserver tel qu’il est. En ce sens, il met en œuvre une logique conservatrice rejetant à la fois les avantages et les inconvénients qu’un bouleversement pourrait provoquer dans le monde qui l’entoure.
D’une part le héros n’a pour unique visée que de préserver le monde tel qu’il est des visées révolutionnaires d’un ennemi qui est lui, insatisfait de l’ordre du monde et cherche à le bouleverser. »
Exemple dans le Seigneur des Anneaux, les Hobbits veulent préserver la Comté, Aragorn rétablir la royauté, tandis que les Elfes ont une attitude plus ambiguë en refusant à l’exception de Légolas et d’Arwen (qui agit par amour) de se mêler de ce qui se passe, ils savent que leur temps en Terre du Milieu est fini, que va venir le Temps des Hommes s’ils triomphent de Sauron.
Sauron lui agit pour régner par le Mal sur le monde, il a des alliés parmi les hommes et parvient à corrompre Saroumane en le convainquant que le changement, par sa victoire est inéluctable.
« D’autre part, la quête du héros est souvent la réitération d’une quête antérieure, accomplie par un ancêtre mythique qui a ouvert la voie aux générations futures mais qui n’a pas résolu le conflit ou le problème s’offrant à lui. Isildur, l’ancêtre d’Aragorn a bien pris l’anneau à Sauron, détruisant ainsi son enveloppe matérielle, mais il n’a pas détruit l’Anneau permettant à Sauron de survivre, c’est à son descendant qu’il appartient d’achever la mission.
Le héros de Fantasy se doit donc de répéter cette quête pour mener à bien ce que son lointain ancêtre a entrepris et amener une solution définitive au conflit. »
Tolkien inscrivait son œuvre dans ce qu’il appelait la « Faërie » une sorte de conte de fée.
« La Faërie recèle bien d’autres choses, en dehors des fées, des elfes, nains, géants, trolls sorcières et dragons. Elle recèle les mers, le soleil, la lune, le ciel ainsi que la terre et toutes les choses qui s’y trouvent : arbres et oiseaux, eau et pierres, pain et vin, et nous-mêmes, mortels que nous sommes, gagnés par l’enchantement. »
J R R Tolkien : Du conte de fée.
Le point commun de nombreux romans de fantasy est qu’ils se déroulent dans des mondes parallèles, ou dans des contextes qui peuvent éventuellement s’interpréter comme un lointain passé oublié (Antiquité, Moyen Age), avec leurs créatures imaginaires, leurs mythe, leurs épopées, leur magie. On y trouve aussi une nature préservée et l’omniprésence du sacré.
La Fantasy n’est donc pas un sous genre d’une sous littérature mais une littérature à part entière dont les sources multiples se trouvent dans l’Histoire et surtout dans les mythes et les contes.