D’un pinceau qui dérive je vais sans halte,
dessinant les tourments et les fièvres lascives
dans le bleu obstiné d’un hier immobile.
Je vais au noir obscur et profond,
là où divaguent les peines comblées d’adieux,
où se forge le passé d’une étrange pâleur.
D’un rose carmin où se pose l’éphémère,
je fige l’instant sur la toile d’albâtre,
et je peins et je peins, et je vis et je vis.
Dans un ricochet de touches multicolores,
quand les soirs se font sentinelle et doux,
je pose tous les battements de mon cœur
au flou désordonné, dans les soupirs tendres
où vibre la vie éclaboussée de lumière,
là où la mort trouve porte close et trébuche.
Je mêle à l’aube, aux brumes dispersées,
l’ébauche de mon regard d’où s’échappe le temps,
les mauves du passé et l’écume de vieilles amours
et dans cette absinthe que ma main décline,
en un parcours troublé de mes songes,
je croise tous les chemins jadis dispersés.
Je fige le mouvement de l’eau en son murmure
pour y dissoudre l’oubli au vent glacé,
quand jaillit la rumeur du jour qui se lève.
Les couleurs se superposent et m’envahissent
comme un chant apprivoisé venu d’ailleurs
et mon âme et mon corps s’y noient sans pudeur.