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 Du rugby solitaire

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epiphyte
Gardien de la foi
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MessageSujet: Du rugby solitaire   Du rugby solitaire Icon_minitimeDim 9 Sep - 22:59

J’ai beau me convaincre en convaincant tout le monde, chaque instant de cette existence n’est qu’un placebo bien fade à mon désir de toi. Discussions sans saveur, rires sans joie, accolades sans tendresse, le monde vit sans moi tant que je vis sans toi, ceux qui l’ont dit avant mentaient sûrement s’ils ne te connaissaient pas.

Sitôt rentré chez moi après l’errance sociale quotidienne, les bonnes résolutions tombent à l’eau, tout disparaît dans la poussière éteinte d’un mobilier désuet, voilà longtemps maintenant que je ne fais plus de ménage, petit ou grand.

Je laisse courir le monde sur chaque chose que tu as touchée un jour, j’écrirai du côté sombre de mon esprit tant que je laisserai l’égoïsme du prochain triompher du mien. Pour une absence ou un bon mot, pour un cri de joie collectif ou des larmes solitaires, qu’importe le stratagème, je poursuis mes pensées vers toi, les trajets se transforment, la destination reste immuable, la route de plus en plus longue. Demain comme chaque jour, je me relirai pour te sentir à nouveau près de moi, que chaque raccourci de mon esprit puisse doper mon cœur d’un fantasme singulier.

Mais je laisse courir les heures hanté par le souvenir, on ne mesure le temps qui passe qu’à la source du volcan. Quand la jeunesse se permet encore de guider le corps à ses excès d’ingéniosité, on creuse le volcan dans une quelconque purée. Quelconque, certes, mais confectionnée avec amour par la femme soucieuse de sa progéniture, elle qui n’a souvent que cela pour vivre. Quand le temps fait son œuvre aux esprits égrotants reclus d’aigreur, le volcan renaît de ses cendres, alimenté d’un vieux mégot au centre d’un cendrier.

D’un bout à l’autre, seul le volcan reste, geste machinal d’une masturbation spirituelle nécessaire aux soirées de doute. Le doute s’immisce entre les cendres, loin des aspirateurs, loin des envies communes. Parti en fumée loin des regards étrangers.

L’autre est toujours un autre, la peur du vide dégueule des volcans sans lave, l’esprit commun reste sale. On ne peut plus rien dire, écrire ne sert à rien. On ne peut jamais compter que sur le temps qui court. On n’oublie rien.



Je gerbe sur les volcans, j’oublie mes égarements aux nécessités passagères d’échanges insipides, demain sera le même, rien ne sert de courir, que chacun reste à son volcan sans partager la roche, tout se perd, tout s’accroche, un jour au bord d’un collier ou sur le bout d’un doigt, se sentir appartenir, besoin de toi, besoin de toi, surtout plus de volcan, je n’en peux plus de m’enterrer loin des vrais trésors enfouis de ce monde.

Loin de toi je divague. Peu m’importe le volcan d’autrui. A la clope nouvelle tout disparaît, seul le cancer se nourrit encore du temps qui passe, nul besoin de mesurer. Je laisse courir la rumeur qui me promet la mort, comme je laisse courir les brutes aux terrains de rugby.



Je devrais me réjouir d’être célibataire pour savourer le dialogue avec mon téléviseur en cette période de coupe ovale du monde, mais paradoxalement je sais que si tu étais avec moi nous aurions pu partager cela, comme une coupe du monde de football me le confirma naguère ; parce que les activités de groupe les plus insipides qui soient ont ce pouvoir de réunir deux personnes qui s’aiment au privilège unique de faire comme tout le monde.

Toi qui ne t’intéresses pas plus que moi aux sports collectifs, tu m’aurais partagé le plaisir simple d’une pizza au coin d’un canapé que nul vrai mec ne pourra m’offrir avec autant d’amour.

L’excitation d’un ballon saisi entre deux poteaux dressés au milieu de cette foule ne sera pas mienne, j’ai rendu ma télévision depuis longtemps pour éviter de payer une redevance pour des chaînes que je n’aurai pas regardées ce soir avec toi.

Même le rugby naguère pratiqué par des bénévoles à la carrure imposante, est devenu source de fric pour ceux qui font semblant de l’aimer, à commencer par l’entraîneur national qui ose renoncer à tant de bénéfices commerciaux pour une place au gouvernement, c’est dire les avantages qu’il doit y avoir à faire partie d’une majorité en temps de dictature ; notre ministre des sports, qui a bien la carrure du rugbyman sans en connaître l’étoffe, ne me contredira pas sur ce point.

Je vais rester au sport en chambre, bien solitaire celui-là, en oubliant que toi, comme tous les autres, parfumera tes humeurs ce soir au gré d’un ballon plus aplati que notre planète. Sauvez Willy, et tuez tous les autres, j’ai évité de payer trois cent euros pour m’asseoir sur une bombe islamique, le sport s’arrête là où la religion commence, le rugby a du chemin à faire pour enrichir réellement ses gourous.



De toute façon, le rugby est réservé aux brutes et aux obèses qui ne tiennent pas sur un vélo et ne sont pas assez agiles pour le football, un sport pour tout le monde en définitive, qui n’a pas encore été phagocyté par l’industrie publicitaire mais cela ne tardera plus maintenant que l’événement prend de l’ampleur. Je reconnais que les règles sont plus complexes que dans bon nombre de sports, mais j’ai du mal, en voyant certaines têtes de vainqueurs, à croire que tous les joueurs les connaissent entièrement. Le public ne s’en régale que davantage, ne comprenant pas lui-même toutes les subtilités d’un sport viril avant tout, nous sommes loin des cours de récréation mais les exclus restent les mêmes, la beauté du sport, l’image du jour, des mastodontes se foutent sur la gueule avec le sourire, tout est autorisé.

Les vrais mecs doivent s’en donner à cœur joie, retraçant les meilleurs moments du match dans des mêlées furtives sur canapé, poussée de nationalisme aviné entre les fesses. J’avoue que je regrette d’avoir rendu ma télévision, si je veux profiter du spectacle je dois me taper les vrais mecs, leurs bières qui tachent, leurs rires gras, leurs effusions viriles et leur brutalité soudainement justifiée.

Tu ne m’en manques que davantage.

Pourtant je préfère le rugby au football, au moins les acteurs ont conservé une once d’originalité, pas encore habillés par de gourmands sponsors, pas encore obligés de se raser le crâne comme l’ont fait les footballeurs dont les cheveux doivent probablement valoir une vie entière de mon salaire de misère, ridicule probablement mais sous verre ça pète en soirée, et puis reconnaissons qu’au moins les rugbymen sont blanc, eux. Pas comme le connard de chien de ce connard de portugais qui est venu s’immiscer chez mon connard de pote pour regarder le match avec nous.

Les présentations ont été furtives, ce gars-là parle plus vite qu’il ne pense, il n’a ni la carrure d’un rugbyman ni la beauté d’un footballeur, portugais nain et bouffi tu seras toute ta vie mon fils, mais comme la plupart des enfoirés tu trouveras une femme et lui fera des gosses pour justifier qu’elle te fasse la bouffe pendant que tu vas fumer ton salaire avec des connards célibataires. Rendant visite à son père, il reçoit quelques beignes pour le plaisir, normal, mais ne peut pas rendre les beignes vu que c’est son père, normal. Alors il lâche son chien, un jour le chien bouffera le gosse, je ne sais pas qui je dois plaindre.

Les gens sont de sacrés personnages, je ne suis pas auteur, juste amoureux de toi. Rendre visite aux bas-fonds de l’humanité ne fait que décupler mon manque, chaque jour un peu plus sournois, percée profonde à mon esprit, je laisse la haine marquer des points, chaque essai transformé t’éloigne un peu davantage.

Je ne peux plus faire semblant, je dois vivre à mon tour. Plaquant le chien d’un saut habile, je lui brise le coup d’une seule main, mon nouvel ami me remerciera plus tard si je lui en laisse le temps. Inutile de se battre, je viens tout de même de sauver un enfant portugais, chaque victoire promet ses pertes à qui sait attendre, depuis le temps que j’attends c’est mon tour de vivre, j’entre sur le terrain, je garde le ballon, plaquez-moi encore j’ai l’habitude, piétinez-moi que tout s’arrête, faites-moi saigner les larmes de mon corps.



Je suis seul devant mon ordinateur, gravant des mots sur un écran fade, plus de télévision, plus de trace de toi, pas de sang sur les murs, pas de sang dans la bouche… rien que quelques milliers de supporters qui m’en demandent encore, mais je n’en peux plus. Lessivé, vidé, séché, je reste fripé à l’intérieur, à tout jamais.Vivent les remplaçants.
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MessageSujet: Re: Du rugby solitaire   Du rugby solitaire Icon_minitimeDim 9 Sep - 23:15

Le manque de l'autre est un vide si insondable qu'on peut toujours essayer de le combler avec des mots, il ne reste souvent qu'une vide plein d'amertume.
Un texte qui fait mal, Epi.
Sinon, je ne suis pas totalement convaincue par ton passage sur les volcans, ni sur les gamins portugais...
Et moi aussi, je préfère le rugby au football, sans doute parce que je n'aime vraiment, mais alors vraiment pas du tout le foot. Mais une petite chose : y'a des blacks au rugby, si si, regarde bien, et en plus, ils sont carrément bons.
Et en plus ce que j'adore chez les rugbymen, c'est... leur calendrier.
Allez, un petit sourire, je t'envoie des bises Smile
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MessageSujet: Re: Du rugby solitaire   Du rugby solitaire Icon_minitimeMer 12 Sep - 12:07

Je pense que tu as fait une faute : "je lui brise le coup"
Le cou plutôt.

Je voudrais pouvoir relever toutes les phrases qui m'ont touchées mais il y en aurait sans doute trop. Alors juste celles qui sont les plus importantes :

"L’autre est toujours un autre, la peur du vide dégueule des volcans sans lave, l’esprit commun reste sale."


"Je gerbe sur les volcans, j’oublie mes égarements aux nécessités passagères d’échanges insipides, demain sera le même, rien ne sert de courir, que chacun reste à son volcan sans partager la roche, tout se perd, tout s’accroche, un jour au bord d’un collier ou sur le bout d’un doigt, se sentir appartenir, besoin de toi, besoin de toi, surtout plus de volcan, je n’en peux plus de m’enterrer loin des vrais trésors enfouis de ce monde."

Mais il y en a plus, même parfois de simples expressions.

J'aime beaucoup. Certaines transitions sont bizarres quand même.

[color=white]par exemple :"Tu ne m’en manques que davantage.

[color:1697=white:1697]Pourtant je préfère "


J'avoue que ça m'a un peu dérangée sur le moment.

Mais c'est du bon, et contrairement à constance le passage sur le volcan me plait infiniment.

Et la fin aussi.

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MessageSujet: Re: Du rugby solitaire   Du rugby solitaire Icon_minitimeMer 12 Sep - 12:07

Oups j'ai eu un petit soucis dans le copier coller.
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MessageSujet: Re: Du rugby solitaire   Du rugby solitaire Icon_minitime

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