Et l'Eternité fit son travail...

Alors elle mourut, et s'ouvrirent les portes du Paradis.
Mais où seul Allah semblait devoir l'accueillir, ce fut une femme qui l'aborda.
- Bienvenue dans ta demeure éternelle, servante d'Allah.
- Mais qui êtes-vous, et qui sont toutes ces femmes ?
Car elle avait remarqué déjà que des milliers de femmes peuplaient ce lieu.
- Nous avons arrêté de compter, alors je ne sais plus combien sont entrées là avant toi, mais tu es la suivante.
- La suivante ?
- La toute dernière femme d'Allah !
- ?
- Pensais-tu réellement qu'Allah avait pu créer cela tout seul ? Avais-tu donc oublié toute ton existence durant que ce sont les fmmes qui donnent la vie et que sans elles Allah n'est rien ? Tu n'as donc rien lu toi-même, comme la plupart qui sont ici, et t'es contentée chaque jour de croire sur parole la croyance des autres, à commencer par le "Prophète" ?... Quelle sottise, quelle injure à ton Dieu !... Mais sâche qu'il ne t'en veut pas, pas plus qu'à toutes les autres avant toi qui, comme toi, se sont laissées bernées par la parole d'un seul, guidant tous les autres hommes à se conduire eux-mêmes en dieux. Voici le Paradis tant attendu, tu y as ta place à présent...
- Mais... et les hommes ?
- Les hommes sont en Enfer bien sûr. Ils ont passé leur vie à imiter leur Dieu en imposant leur vision des choses à "leurs" femmes, ils se sont engagés sur une route que l'on avait tracée pour eux, sous couvert de la Parole Divine qu'ils n'ont pourtant jamais comprise... Ils ne méritent que les flammes, car Allah ne supporte pas l'érudition blasphématoire, et encore moins l'imitation.
- Mais...
- Cesse enfin de douter, toi qui as eu tant de facilités à croire quand tu étais vivante, le Paradis vaut mieux que l'Enfer, et il t'es offert pour l'éternité !... Certes ce n'est pas celui qu'on t'a laissé miroiter, mais si tu avais été moins sotte tu aurais su te cultiver, t'instruire, te renseigner, et te prémunir de la bêtise infinie des hommes, et de leur propension à l'avilissement. Je sais qu'il ne t'ont pas aidée à cela, se prévalant d'ordres divins pour t'imposer leur façon de vivre, de croire, de prier et de leur obéir. Mais Allah, pourtant, ne t'a jamais considérée comme inférieure, parce que si le Paradis naît au pied des mères, ce sont avant tout les femmes qui donnent la vie, et Allah respecte la femme plus que tout... Les hommes, non.
- ...
- Je sais, c'est une réaction courante. Dis-toi que tu aurais pu vivre ta foi de mille autres manières, et profiter de ton existence charnelle tout en te préservant pour Lui, puisque c'était inévitable... mais, comme les autres, tu n'as fait que t'avilir et obéir aux hommes et leur croyance erronée... Ce n'est cependant pas un pêché de n'avoir pas vécu... dommage, peut-être, c'est ce que je me suis dit au début, mais au fond, le Paradis est là, éternel, et nous voilà les femmes d'Allah, tandis que nos bourreaux brûlent en Enfer... Nourrir l'humanité de nouveaux êtres chaque jour est notre seule fonction, mais après tout, puisque nous avons été dupes, nous nous y sommes habituées, tu verras que l'on n'a pas besoin de s'y faire, c'est déjà le cas.
Il y eut un moment de regret, très intense et très bref.
Mais sa foi était intacte, pesant depuis si longtemps sur une existence gâchée, par sa faute, seule, sans doute, puisque rien jamais ne lui avait été caché vraiment.
Et l'Eternité fit son travail.

Sur Terre, il n'était plus loin de mourir.
Une vie bien remplie, chaque jour à penser à elle, chaque jour à se souvenir, et chaque jour à regretter.
Regretter de n'avoir pas su, regretter de n'avoir pas pu.
Bien des années auparavant, il l'avait laissée plonger dans une foi inculte, sans se douter des conséquences.
Il avait bien tenté de lui expliquer, lui qui voulait qu'elle se cultive, qu'elle s'instruise, qu'elle se renseigne et se prémunisse de la bêtise infinie des hommes et de leur propension à l'avilissement.
Mais les paroles du mécréant n'avait jamais fait que rebondir aux murs sacrés de l'errance.
Plus le temps était passé, plus les paroles s'étaient enfoncées dans le mur, jusqu'à s'y perdre sans cohérence, sans écho, sans espoir.
Et puis le mur s'était écroulé, derrière il n'y avait plus personne.
Il n'était plus loin de mourir et sa vie n'avait été qu'une errance, bien singulière, à se sentir coupable ou responsable, selon les jours ou les humeurs, à se sentir aussi perdu que celle qu'il avait laissée se perdre.
Parfois, il s'était dit que tout cela n'était qu'un choix, bien volontaire, et que l'on ne peut rien y faire à ceux qui font des choix de foi.
Mais sur son lit de mort, encore ces remords.
De n'avoir jamais été que mécréant, incapable de s'opposer aux paroles prétendument divines.
De n'avoir jamais été qu'un faible, hypocrite au sein des autres, à essayer chaque jour de se donner bonne conscience sous couvert de faculté de juger, de se cultiver, de s'instruire, de se renseigner et se prémunir.
De n'avoir jamais osé lui dire en face que la connerie de l'esprit humain se comble à force d'enseignement.
De n'avoir jamais vécu, pour se rapprocher d'elle à cet avilissement humain.
Au moment de mourir, il prit conscience qu'un mécréant pouvait gâcher sa vie autant qu'un croyant, et qu'au fond, tout cela ne servait à rien, mais que les êtres humains se ressemblaient tant...
Pourtant, les mécréants semblaient parfois mieux comprendre les paroles de Dieu, peut-être qu'à force de scepticisme on finissait par écouter mieux.
Comme tous les autres hommes, pourtant, la mort lui offrit l'Enfer, lui qui n'y avait jamais cru.
Mais l'Enfer, il n'avait pas vraiment besoin de s'y faire, car c'était déjà le cas.
Aux portes des premières flammes, il y eut un moment de regret, très intense et très bref.
Il paraît que le cerveau meurt après le coeur.
Quelle drôle d'idée, vouloir se faire incinérer.
Et l'Eternité fit son travail.

Texte très engagé, loin de ce que tu as produit avant.
Le paradis... j'ignorais qu'il existat pour l'Islam, et de même pour l'enfer donc. Mais pourquoi ce choix de religion plutôt que le christianisme ? Par rapport à une expérience vécue, ou bien parce que le côté "macho intégriste" y semble plus courant ?

En lisant le début, je m'attendais à ce que la femme décide finalement d'aller rejoindre l'enfer, pour enfin profiter des hommes !

Je n'écris pas depuis si longtemps, que, forcément, c'est quelque chose qui m'engage qui me pousse à écrire.
Histoire vraie aurai-je dû ajouter ?
J'ai lu plus de choses sur l'islam en une semaine que toute l'humanité j'ai l'impression, quand je vois l'hypocrisie commune qui se complait à ne pas considérer cela comme une secte abjecte.
Je ne suis pas objectif ?
Je ne le suis plus, non...
Mais je me suis renseigné, et bien sûr que le paradis existe dans l'islam, mais pas celui-là... et pas non plus celui que tu proposes, car pour elle, profiter, ça n'existe pas.

C'est très intéressant de voir que certaines de tes idées rejoignent mes interrogations.
Par exemple, je suis extrêmement sévère envers ces femmes musulmanes qui se laissent volontairement enfermer et se sentent contraintes d'obéir à une religion qui fait d'elles des riens du tout. Je ne parle pas forcément des textes, qui sont loin d'être tendres à vrai dire, mais de l'interprétation qu'en font couramment les croyants. C'est le plus important, non, les faits et non les intentions ?
On me dira : mais quel autre choix ont-elles à part se soumettre ? hé bien, ne pas se soumettre. Elles risquent leur vie ? La belle affaire. Les femmes d'occident ne se sont-elles pas battues pour obtenir chaque parcelle de droits ou de libertés ? Vous croyez qu'elles ont obtenu ces droits sans se battre et parfois sans qu'il y ait des victimes ?
Certaines femmes de l'islam se rebellent et ont sur le dos une fatwa qui les condamne à mort. Et alors ? Elles continuent. C'est comme cela qu'on progresse vers la liberté.
Celles qui ne se dressent pas contre ces injustices sont à mes yeux des esclaves. Elles ne valent pas plus.
La vie est une petite chose éphémère, un souffle imperceptible qui peut s'éteindre en une seconde, une étoile pâle qui ne brille qu'un bref instant. Elle a moins de valeur qu'une chose aussi importante que la liberté, celle qu'on choisit, celle qu'on décide. Au milieu des contraintes que nous impose notre vie, ce socle qui nous fait avancer, c'est la possibilité d'un choix.
Je suis donc sensible à ce texte, et je n'avais pas besoin de lire qu'il s'agit d'une histoire vraie pour le deviner.

Celle dont j'ai parlé ici s'est convertie d'elle-même, et c'est son passé douloureux qui a nécessité ce besoin de s'accrocher à quelque chose...
J'ai laissé faire et forcément maintenant je m'en sens coupable.
Parce qu'elle est tombée sur un extrémiste qui essaye de la convaincre de la rejoindre, comme l'ont toujours fait ceux que la parole divine excuse.
Après quinze jours de douleurs, de questions et d'errance... (oui, désolé pour DSK mais cette histoire-là m'a retourné les tripes bien davantage)... je viens enfin de l'avoir au téléphone.
Ce qui me prouve qu'elle n'est pas encore totalement privée de libertés, tant mieux... mais vu qu'il n'a absolument pas voulu me parler, au contraire, et que la conversation fut brève... je me dis qu'il faut agir sans pour autant savoir comment.
Prenant les pincettes, je dis que je respecte bien sûr sa foi, mais pas cette manière de la vivre... mais que si elle est heureuse et qu'elle me le dit, vraiment, alors, je lache l'affaire...
Et bien entendu, elle me répond que c'est pas si gagné que ça... avant de couper.
Alors j'en sais davantage... mais je fais quoi ?...
Je lâche pas l'affaire.
Mais j'ai tellement l'impression de marcher sur des oeufs...

Sms que je reçois à l'instant.

Je vis un enfer mais je suis grave amoureuse, ne me contacte pas, jtm.

??????????????????????????????????
!!!!!!!!!!!!
Quelqu'un pour me sortir des larmes et me dire ce qu'on fait dans ce cas là ?

Je vois le problème.
Avant de sortir avec mon ex, elle était avec un musulman, amoureuse, mais elle vivait un enfer.
Lorsqu'elle a découvert que l'amour c'était plus d'empathie, de symbiose et de respect (en tombant amoureuse de moi) que de soumission à celui qu'on adule, j'ai dû l'aider à sortir de cet enfer, c'est à dire de l'emprise de ce pervers narcissique quasi intégriste.
Sauf qu'elle n'était pas convertie.

Pour moi, la solution est dans l'amour, et le constat de ce qu'est vraiment l'amour, face à une séduction-passion qui oblitère 50% de ce qui est primordial à force de compromissions égophages*.

Hélas ami, la solution miracle me parait difficile à trouver dans cette situation précise... Il faut qu'elle ouvre les yeux, mais comment, si on veut respecter ses choix ? C'est un problème similaire à celui concernant les jeunes qui tombent dans les griffes d'une secte, auquel se heurtent les parents.


* Oui je sais, ce mot n'existait pas, mais il fallait l'inventer.

J'ai entendu il y a peu une citation qui m'a semblé intéressante :
"Un couple, c'est deux personnes qui ne font qu'un, mais lequel ?

Ce texte, ce n'est pas comme d'habitude... d'ailleurs, vous aviez vu que l'habitude, je l'avais perdue...
Merci constance pour tes mots, qui bien sûr ne me rassurent en rien, mais m'assurent que je n'ai pas d'autre choix qu'agir.
Je ne parle pas bien sûr de ta citation, qui servira chacun d'entre nous, mais des choses qui se disent ailleurs, parce que dans le cas qui me préoccupe, en plus, ce genre de citation n'a aucune valeur...
Je m'engage dans quelque chose de dangereux, je le sais d'avance...
Mais écrire ne suffit jamais et n'a jamais suffit.
Et même si cela devait être mon dernier combat, quoi qu'il en soit et quoi qu'en deviennent les travaux inachevés (c'est à dire rien mais peu d'importance), je vais le mener jusqu'au bout, parce que justement rien n'a plus d'importance à mes yeux à présent.

Quel engagement noble ! Mais méfie-toi... Il y a des gens dangereux dans les sphères du fanatisme.

Heu... Tu ne veux pas finir ton roman avant ? (nan je plaisante)