Poème à la grâce de Dieu
Il était une fois,
Un rêve.
Une date ?
Un songe.
Bienvenue… aux mots !
Traités de tous les noms,
Mal pensés, mal pansés,
Les mots sont mal-aimés.
Et pourtant !
Sur les flots du temps,
Ils sont les messagers des dieux.
Tournant le dos à
Leur sinistre grand-mère,
- Ou grammaire,
Ils sont libres, beaux,
- Mêmes dans les livres,
Animal indompté.
Foin des longs discours !
Le mot est gemme,
Bijou, joyau, opalescence !
Ecoutez le chant de la lumière
Dans vos recueils
De poésie !
Rencontre
Corps de sable,
Statue de sel,
Rivières de glace.
Ciels noirs,
Mitrailles de plomb,
Humanité obscure.
Arbres tordus, pliés par les vents,
Fleuves de grande sécheresse,
Tous les murmures absents.
Toi, solitude.
Valse à trois temps
Danser,
Comme dansent les mots
À la surface des lèvres.
Danser,
À perdre la raison
Et poursuivre les ombres.
Danser,
Comme les derniers oiseaux
Dans le soleil couchant.
Danser,
À susciter la nuit
Pour compter les étoiles.
Danser,
À chevaucher les flots
Et puis rêver du jour,
Au fond du puits.
Errance du monde sans fin
Avec des mots, avec des songes,
Tissés de murmures invisibles,
Ecrire l’impossible roman,
Piano ma non troppo.
Tous ces mots aux paupières muettes
Qui perlent sur les murs,
Parole vive condamnée,
Sourires d’un monde oublié.
Dans un souffle retenu
Surgissent les multitudes lointaines
Peuplant les planètes obscures,
Symphonie du silence.
Alors choisir le bateau sans gouvernail
Qui sait retrouver les sirènes,
Captives éternelles
Des mondes sans horizon.
Pour laisser loin derrière
Les amoureux des pierres,
Vivants aux songes glacés,
Fantômes d’un jour sans ombre ni raison.
Et passer outre les fenêtres éteintes,
Minéral triomphant, abandonnées de l’aube.
- Mais voici que la lune s’est évaporée,
Préférant le chatoiement du sens au multiple reflet.
Automne discordant
Etendues pâles sous le soleil trompeur,
Lanterne sourde du jour qui s’en va,
A nouveau la grande mystification d’automne.
A la triste lampe des antipodes,
Le magicien des couleurs
Arrache ce dernier cri au monde.
Et sous le chapiteau au bruissement fébrile
Où les enfants se pressent,
Résonne la mélodie criarde de la saison qui meurt.
Avec des planches, avec la pluie,
Faire un bateau qui passe.
Aux Heures magiciennes
- Quel joli crayon !
Il donnerait presque envie d'écrire.
- Ecrire, écrire,
Et pour dire quoi ?
- Mais rien, et... crire,
Comme un cri.
- Drôle de conception de l'orthographe !
C'est cela, crions, vociférons,
Donnons de la voix !
- Je préfèrerais : miaulons.
- Comme un chat ?
- Oui, comme un charme.
- Soit, on attend le sortilège.
- Murmurons donc ensemble le doux enchantement du jour.
Bribes, notes, mots
Dans le silence et l’attention,
Germent les mots.
Loin des sécateurs ricanants,
Petit mot deviendra grand !
Avec amour, avec passion,
Savez-vous planter les mots ?
De l’arrosoir curieusement
Une grenouille a bondi vers l’horizon.
Avec patience dans la pénombre,
Les mots se font colliers de perles,
Ornements de la nuit, colliers de mots
Jouant dans la lumière.
Grandes Découvertes
Au temps des goélettes,
Dans chaque île rencontrée,
Pays de grande découverte,
Tout un peuple de monstres guettant les égarés,
Terrifiants, terrifiés,
Démons des antipodes.
Et toujours voiles gonflées, pavillons déployés,
Dans l’embrasement du ciel,
Vers toujours plus d’ailleurs.
Pontons brillants, rames dressées,
Rêves d’Eldorado
Au regard insensé.
Mappemondes sans fin,
Cartes en devenir,
Les mondes s’écrivaient
Au gré du vent,
Au gré des temps,
Sous les étoiles.