Je suis d’ici et j’y resterais bien
Quelque part au pied des montagnes
Dominant la Garonne
Dont la petite Ourse vient abonder le fleuve.
C’est le chemin de l’Espagne aux passages incessants :
Auquel de ces passagers mes racines ?
Pourquoi pas un romain qui m’approcherait de mon autre
Là-bas, aux Apennins…
Comme je le voudrais !
Au fond des ruisseaux d’ici coule une encre limpide et claire
Qui m’écrit le chemin,
Au cœur de taillis anciens craquent des branches mortes
Qui parfois m’assourdissent,
Mais jusqu’à ma source
Jusqu’aux neiges d’où partir pur,
Je suivrai la pente rude
Où noire est l’ombre
Et rare la lumière,
Où le souffle se serre
Et l’œil se délecte
De la rondeur des galets, de l’aconit casque bleu,
Des gentianes et lis d’or
Et de la soldanelle rose,
Ces calices où j’ai bu sans retenue la jouissance passagère…
Passés les bois tendres de la jeunesse,
Persistent les résineux
Et au-dessus la vue s’étend, paraissent les sommets.
J’ai choisi le mien
Dont les bras encirquent un lac profond et lisse.
De ses reflets, j’écris des poèmes
Sans cesse jusqu’au jour où du pic
L’orage ou le vent m’emporte.
Dans un dernier vol défilera ce long sentier
Et je pourrai fermer les yeux, m’enfouir,
Retrouver l’humus et renaître graminées,
De celles qui frangeraient un autre chemin
De leur incandescence au soleil.