Et vient ce temps, ou chaque mot est une douleur. Ou pour se souvenir des choses il faut leurs sacrifier nos larmes. Le monde nous devient étranger, ainsi que tous ceux qui le peuplent, et leur regard est une souffrance puisque les codes nous manquent pour deviner leur sens. Ceux qui nous étaient proches s’éloignent peu à peu faute de nous comprendre. Je ne devine plus les pensées, je ne comprend plus les idées. J’ai du mal même à me souvenir de moi-même. J’ai mal, mais c’est un mal diffus, au-dedans, très profond, comme si quelque chose tentait de travestir mon âme. Je tourne en rond, comme un très vieux cheval, comme un très vieil objet, comme une chose aveugle qui ne comprend plus rien…
Je vois venir l’instant ou je ne saurais plus. Ou je ne saurais plus retrouver ni le rire ni la larme qui ouvrira les portes des souvenirs cachés. Je sais qu’un jour viendra ou je ne saurais plus. Regardant un miroir, je ne me verrai pas.
Et ma peur vient de ce qu’à ce moment précis je ne saurais saisir toute l’horreur de mon cas. Peu à peu je me serais, sans même m’en rendre compte, extirpé de moi-même.
Je serai mort et vivant malgré tout.
Les gens me regarderont, mais ce ne sera pas moi, un simple étranger portant mon costume de chair à qui il faudra tout réapprendre en vain. Je pleure la disparition progressive de ma vie au profit d’un autre qui n’existe pas. Je pleure cet amour futur qu’ils dispenseront à cet étranger.
Et je prie, pour que cette dernière étincelle brûle assez longtemps pour que j’ai le courage d’en finir… Le courage d’en finir… le courage…
Et bien Papy, qu’est ce que vous faites devant la fenêtre ouverte ? Vous allez prendre froid…
Rejoignez nous, nous allons commencer une partie de scrabble…