Nocturne

Alors là, on sent une maitrise et un pied de nez que je qualifierais de quasi géniale !
Parce que ton poème commence comme un hymne presque emphatique, d'un beau classicisme quasi gothique, avec abondance d'adjectifs bien échevelés.
Puis la deuxième strophe, cet énigmatique : "« C'est l'heure des procès! »", là j'aurais du me méfier et voir que tu me trimballais dans cet univers romantique et sombre.
Repris pas le "en somme".
Et là, pirouette dans la dernière strophe, délire moderne et insolent...
Alors je vais dire que ton poème ne me bouleverse pas, j'ai lu tes textes de toi d'une sensibilité merveilleuse. Mais c'est d'une habileté quasi démoniaque, et je te tire mon chapeau bas.

Quelle maîtrise et quel esprit!
Superbe.

Une vision entre Goya et Maldoror.
Sombre à souhait ce Nocturne, une ambiance que j'aime bien.

J'attendais avec impatience ton premier post parmi nous, et je ne suis pas déçu. Le mélange d'alexandrins et d'hexa fait toujours son petit effet, et je sais que tu en es féru.
On sent l'influence des "maudits", Baudelaire notamment. Un poème que ne renierait probablement pas Belette, aussi... pour le côté organique, et méticuleux.
Toutefois j'y décèle des lourdeurs, beaucoup d'adjectifs, de ponctuation, et des doubles précisions, soit épithètes, soit actions...

les "sourds grognements rauques"
"s'affaisser et déchoir"
"l'odeur fétide et rance"
"Comme une odeur salace, / En somme"
À te lire, on pourrait croire que tu es maniaque, et que ton désir d'exhaustivité t'empêche d'aller simplement à l'essentiel.

J'ai particulièrement apprécié :
"l'odeur fétide et rance / Des rêves qui trépassent"
"A qui donc est la main qui tient les sabliers?"
"Le temps ... se raye"
Et la phrase en anglais qui semble tirée d'une chanson
(néanmoins j'aurais plutôt écrit "turn off the lights" qui irait mieux avec "gimme", "switch" ayant une résonnance plus difficilement poétique et étant plus précis passerait avec "give me")

Continue à poster ici et tu seras exaucé, cher disciple !

Paris by night … La
densité d’impressions qui oscillent facilement
entre sarcasmes et dégoût et un langage
qui s’accommode aux images et fait penser au moloch qui régurgite ses
immondices. Impressionnée – Solweig

Alors alors alors...
En effet Filo, je ne renie pas .
Mais plus que l'aspect organique et méticuleux, ce sont plutôt le travail sur les sons, le vocabulaire, la syntaxe un peu saccadée ( par la ponctuation autoritaire justement ), certaines paires de rimes ( glauque/rauque ) qui m'intéressent et me séduisent ici...

Poème d'ambiance pur, avec comme d'habitude une volonté de peinture par les sens et un caractère halluciné ( pas mal rendu par certains verbe ) qui sont assez caractéristiques de tes derniers textes.
Rien à redire sur les redondances signalées par Filo : cela me rappelle énormément une des figures de la poésie latine, et il en existe quelque trace chez les poètes latins donc... Mais ça n'est pas ma figure de style préférée cela dit.
( détail : d'accord avec Filo pour le "turn off" plutôt que "switch off"... Et après avoir googleisé la phrase, je n'ai pas trouvé de chanson de référence )

Côté petits défauts, je note certaines rimes qu'on retrouve pas mal chez toi ( ombre/sombre ou entailles/entrailles... Mais j'ai le même travers ), et surtout le "fait des incantations" qui m'a un peu surprise. Le verbe faire parait brutalement fade par rapport au soucis de précision dans le vocabulaire, visible partout ailleurs.

Enfin voila, ambiance, ambiance et maîtrise... Comme Constance, je dirais que le travail m'a plu et que je me suis bien amusée à voir le retournement angliciste sur la fin, mais que ça n'est pas ce texte qui occultera certaines perles précédentes...
C'est du Pierre, et du bon Pierre mais -peut-être parce que nous en avons un peu parlé avant- je m'attendais à ce que tu chamboules plus encore tes habitudes dans ce texte... J'ai hâte de voir le prochain, pour voir ce que tu fais des changements que tu annonces ici !
Entre ce talent du climat et une touche d'insolence naissante, ça va faire du bruit

Je découvre et suis sous le charme. Et même et malgré moi, c'est la voix de Léo Ferré qui disait ces mots-là pendant que je les lisais. Avec son articulation parfois sèche, parfois délicieusement coulée, et... et je me suis régalée.

Du grand art, un texte à dire, sans musique, dans le noir d'une salle où l'on retient son souffle.

Un texte de scène.