Confidence d’un gisant.

Et toi tu voudrais vivre,
appuyée sur ce corps,
que vous m’avez volé ?

J’ai fondu sous le sable d’un tyran,
un matin,
t’en souviens-tu ?

Dans les années blanches de l’âme,
j’ai pleuré toutes mes larmes aveuglées
sur le lit de douleur.

Je l’ai lâchée de mes entrailles,
dans la ténèbre
baignée de sang.

………………………………….

J’ai griffé le mur dégoûtant
de la maison souterraine où vous m’avez jetée,
moi qui voulais aller au bal !

Ils ne m’ont même pas laissée filer
jusqu’au pont des évanescences,
non. Même pas.

Je traîne,
accrochée à ta peau,
livide et froide.

Mais le temps a laissé tomber sa serpe.
Je l’ai entendu sonner ses trois coups.

Il approche, ma belle, l’instant de délivrance.

Terrible, je sens une haine et une amertume qui me confondent, comme si le venin entré en toi ressortait dans ces mots.
Terrible, je n'envie pas celle à qui tu t'adresses, elle sera donc seule à la fin des fins.

En fait, j'ai voulu donner ici la parole à une jeune femme qui attendait un enfant et que l'on a fait accoucher prématurément avant qu'elle ne meure à 20 ans des suites d'une pneumonie.
Elle accoucha donc à 7 mois d'une fille, cet accouchement ayant été provoqué par son mari médecin, qui mettra l'enfant dans du coton devant la cheminée (l'histoire se déroulant au XIX ème siècle) et qui la veillera ainsi pendant toute une année en restant enfermé avec elle dans la même pièce. L'enfant vivra et aura quant à elle 7 enfants qui auront tous des destinées tragiques. En outre, le "fantôme" de cette femme qui en raison d'une occultation initiale de cette mort trop douloureuse n'a pas pu se libérer de ses liens terrestres, va s'accrocher à chaque génération à un des membres de la famille empêchant celui de vivre sa propre vie.
Puis vient le jour où un membre de la 3ème génération comprend, refuse , répare et va enfin sortir de ce cycle infernal.

Ceci est inspiré d'une histoire vraie et je trouve que c'est une bonne idée pour un roman ou une nouvelle...

Merci de cette explication, Margo.
J'avais saisi pour l'accouchement, même sans connaitre les circonstances de cet évenement, ça c'était assez explicite : "Je l’ai lâchée de mes entrailles, dans la ténèbre/ baignée de sang."
L'histoire est en effet étrange et terrible. Elle mériterait d'être exploitée pour en faire une nouvelle, tu as raison.
Je serais curieuse de voir ce que Filo serait capable d'en faire, dans un style un peu à la Edgar Allan Poe.
Et comparer avec ce que toi tu pourrais écrire sur le sujet.
Tiens, que voilà une bonne idée, s'pas !

Les revenants "reviennent" parce qu'ils exigent quelque chose, en général réparation d'un tort. Et bien peu de vivants ont le courage de leur faire face et de leur demander ce qu'ils veulent...
Ton histoire est d'autant plus terrible qu'elle est vraie, hélas.

Oui. Elle est vraie.

J'aurais du mal à écrire une histoire sur commande, enfin sans que ce soit mes propres idées de base, mais je suis sûr que Margo s'en tirerait bien !

En tout cas ce texte est puissant et bouleversant.