À vos vers, fixe !

« Viva España ! »
« Forza Italia ! », chantonne la SEXTINE…

Francesca murmurait un flux de tarentelle.
Carmen lui répondait d’un air de flamenco.
J’en fut bouleversé et fis la villanelle
Que voici pour mes sœurs latines. Oui, pour celles
Dont les voix font un chœur aux cieux, comme un écho,
Transporté par les doux soupirs d’un sirocco…

Ibérique se fait le chaud du sirocco.
Mais une brise d’Est mêle sa tarentelle
À son souffle latin et se fond à l’écho.
Il fait de l’harmonie un curieux flamenco,
Couplant les Appénins aux Castilles, à celles
Pour qui, bouleversé, j’écris ma villanelle !

Pâtes et paëlla sont en ma villanelle,
Dégustée au patio sous le chaud sirocco…
La corde au son pincé est dans les bras d’icelles :
Carmen la mandoline en une tarentelle,
Francesca la guitare en flux de flamenco.
Je suis bouleversé par ce charmant écho !

La péninsule et la botte se font l’écho
De mon latin perdu en cette villanelle :
J’ai ouï dans la botte un air de flamenco
Et dans la péninsule, au troublant sirocco,
J’ai entendu chanter un flux de tarentelle.
Je rend grâces ici à mes deux sœurs, à celles

Dont César fut l’aïeul, et Charles Quint ! Oui, celles
Qui mêlaient deux enfers en faisant un écho :
Celui de Cervantès à une tarentelle,
Où j’ai puisé les vers de cette villanelle,
Enivré de soleil et de blanc sirocco,
Celui de Dante, enfin, à un gai flamenco…

Que ne suis-je chanteur dell’arte flamenco
Pour Francesca, Carmen, mes sœurs latines, celles
Dont les voix transportaient un curieux sirocco
De botte en péninsule et fabriquaient l’écho
Que j’ai, bouleversé, mis dans ma villanelle,
Murmurant séguedille, opus et tarentelle !

Sangria, tarentelle, asti et flamenco
S’en vont en villanelle, honorer les icelles
Dont j’entendis l’écho au cœur du sirocco.

gepetto

Une chanson qui offre un dépaysement délicieux en même temps qu'un chaleureux et bel hommage à deux contrées devenues soeurs dans tes vers.
Et chapeau pour l'exercice de style !

bel exercice de style et bel évocation musicale et culinaire de ces deux contrées du Sud.

Ca, c'est un exercice littéraire de très haute volée. Juste pour nous rappeler qu'avant de versifier, il n'est pas complètement inutile de connaitre les bases... une sextine, tu n'as pas choisi la facilité !
Mais ce que j'aime le plus, c'est que tu as largement dépassé ces difficultés techniques pour nous concocter un délicieux moment de confrontation méridionale, rapprochant ces deux pays à la fois si présents dans nos coeurs et parfois si... exotiques. J'adore...

je ne connaissais pas la chapelle sextine...merci Gépetto de nous transmettre ce savoir-faire, toujours avec ton habileté d'orfèvre.

Vous le dirai-je en une strophe ?


Distique
Pour plate qu’elle fut, sa rime vint de moi
Et sa richesse fit de la faim de « Vous », « Toi ».

Tercet
Plongeant sous les sourcils aux lueurs de lampyre,
Ma plume dans vos yeux, encriers de porphyre,
Puise sa sève bleue en poésie de lyre…

Quatrain
Le parchemin gaufré de votre peau de myrrhe
Offre à ma plume émue un air de cantilène ;
Aux plis de votre cou, que sa césure admire,
S’abreuve mon vers nu, assoiffé de sa veine…

Quintil
Ma plume, en rimes de diamant,
Un poétique enjambement,
En vous rêvant, apprend à dire,
Des anacoluthes d’aimant
Et de doux vers de cachemire…

Sixain
Six vers pour vous : preuve par six…
Le faut-il ? Repetita bis !
Six fruits cueillis dans ma coudraie :
Pieds menus, rimes d’hirondelle,
En sixain pour votre prunelle,
Six fleurs au cœur de mon ivraie…

Huitain
Si je n’eusse point écrit
Tout cela pour vous que j’aime,
Enjambements en doux cris,
Acrostiches en diadème,
Embrassements en poème,
De mon lundi à mon dimanche,
Ma feuille fut restée, et mon front en est blême,
Désespérément blanche !

Dizain
Fleuve de vers rimant, villanelle, odyssée,
Madrigal, virelai, sonnet, pantoum, ballade,
Rondel d’alexandrins, musique entrelacée,
Acrostiches en flux, césures en croisade,
Stances, strophes, couplets, triolets en cascade,
Sextines du passé, ïambes, chants royaux :
L’arbre-poète perd mon âme en ses rameaux !
Pourquoi psalmodier en un discours-poème
Ce que je veux vous dire en un tercet de mots ?
Mon dizain médiéval vous chante : « Je vous aime ! »

gepetto

Et à la fin de l'envoi, il touche !
Magistral...

La dame en son castel s'incline troubadour!

LAI et VIRE...

Il est lai :
J’écris pour ma Muse
Car elle ne m’use
Jamais !
Son poème fuse,
Ma plume diffuse
Son lait !
À ceux qu’elle amuse,
Émeut, qu’on m’excuse,
Je plais !
Celui qui m’accuse,
Disant que j’abuse,
Est laid !



Mais il vire :
À Monsieur Voiture,
Je donne en pâture,
Mes vers.
Que nulle dent dure
Il n’ait pour la cure
De vert
De ma plume impure.
Son encre est iodure
De mer...
Si Virgile en perd
Son latin d’hier
Et jure,
Si Marot, peu fier,
En a un triste air,
J’assure :
Ma plume de fer
N’écrit qu’un éther
Nature !

gepetto