On ne change pas un bémol en dièse

On ne change pas un bémol en dièse

On ne commence pas la partition
par un la dièse
tu as osé briser le rythme
des sanglots
des notes prunes
pendues sur la portée des regrets

On ne touche pas aux touches
blanchies par le vieux nuage
aux béquilles de pluie
il flotte un rondo de printemps
sur les camélias
Ruissellent les soupirs

On ne laisse pas l'opéra sans voix
à l'approche des lamentations
qui jettent leurs fleurs pourpres
du balcon endimanché
les épiglottes solaires
ont encore toussé
la soupape du rêve
s’est refermée sur la nuit

On ne valse pas avec le noir
du spleen végétal
ces croches fleuries
sous l’étreinte soprano

Non Monsieur

On ne change pas un bémol en dièse
quand la vie revêt
sur le visage
un sourire de ruines verticales
une cascade de pétales amnésiques

Non Monsieur

J'aime bien l'association des couleurs et des notes.
mention pour "les épiglottes solaires ont encore toussé".
Même si j'avoue ne pas bien comprendre à quoi tu fais allusion!

Pour une fois, je vais expliquer
Ce texte fait référence à la Dame aux Camélias d'Alexandre Dumas fils et de la Traviatta de Verdi.

Le passage que tu cites morgane est dédié à l'héroïne malade.

Voici quelques années, j'avais un ami perdu de vue depuis, qui avait une trés bonne oreille. Il adorait le piano et savait parfaitement retrouver un morceau juste à l'écoute sauf qu'il n'avait jamais étudié le solfège. Il avait appris un peu tout seul. Il m'a joué un jour chez moi, la dame aux camélias d'après Ennio Morriconne que j'ai adoré à l'écoute. Je lui ai demandé s'il avait la partition et il m'a répondu qu'il avait retranscrit à l'écoute l'intégrale du morceau. Lorsque j'ai eu la partition, enfin la sienne retranscrite entre les mains, je me suis dit qu'il avait compliqué le déchiffrage et surtout qu'il ne connaissait pas l'ordre des bémols et des dièses que je lui ai appris par la suite.

En tout cas, j'ai entendu de bien jolies notes au fil de ton poème.
J'aime beaucoup les "notes prunes pendues sur la portée des regrets"

De très bonnes choses, et de moins bonnes.
Déjà le titre me parait si évocateur et mystérieux à la fois, j'aime beaucoup.
Après, je dirais, le défaut principal est l'accumulation des "de", "du", "des" dans les phrases. Et je peux en parler, j'ai le même (défaut, je veux dire) ! Compte toutes les fois où tu l'utilises ici, tu verras.
Les "notes prunes", "la soupape du rêve", les "pétales amnésiques", j'adore, comme beaucoup de ces images que tu sais si bien inventer.
"Epiglottes" est un mot bizarre, mais pourquoi pas ? Le "non monsieur" pourrait être contesté, il ne me gêne pas sans pour autant me motiver plus que cela.
L'ensemble reste très agréable et inventif, plein de liberté et de fantaisie.

On ne change pas un bémol en dièse

On ne commence pas la partition
par un la dièse
tu as osé briser le rythme lacrymal
Ces notes prunes
pendues sur la portée des regrets

On ne touche pas aux touches
blanchies par le vieux nuage
aux béquilles de pluie
il flotte un rondo printannier
sur les camélias
Ruissellent les soupirs

On ne laisse pas l'opéra sans voix
à l'approche des lamentations
sur leur balcon endimanché
jetant leurs fleurs pourpres
Les épiglottes solaires
ont encore toussé
la soupape du rêve
s’est refermée sur la nuit

On ne valse pas avec le noir
du spleen végétal
ces croches fleuries
sous l’étreinte soprano

Non Monsieur

On ne change pas un bémol en dièse
quand la vie revêt
sur le visage
un sourire de ruines verticales
une cascade aux pétales amnésiques

Non Monsieur

effet bizarre, à la fois sensible aux images mais moins sensible à quelque chose d'hermétique. J'aime en tout cas l'effort de l'écriture dans une économie de moyens.

Bizarre oui, on dirait deux textes qui se mélangent étroitement, superposés , comme deux photos, la trame et le sujet.

Un côté rigide comme la partition, et un côté évaporé comme la musique...

Ce pourrait être exactement ça : une partition écrite et donc immuable et figée sur le papier, et à côté l'interprétation chaque fois différente, et surtout ce que ressent chaque "écoutant", qui est forcément différent pour chacun.

Un vers me gêne cependant : "On ne touche pas aux touches". Mais peut-être la répétition si rapprochée est-elle voulue ?

Ce que j'apprécie, c'est ton sérieux immuable, ma Soso !
On te dit : "mouaif, là ça pourrait être mieux", et mademoiselle se remet sagement au travail pour essayer d'améliorer son texte. Comme tu es appliquée ! Un bon point...
Je préfère la 2ème version.