I) LES DEMONS
Je ne vais pas prétendre « définir» le Mal…
Il est si fluctuant, a tant de visages et de façons de se manifester, de l’horreur absolue aux petites mesquineries quotidiennes…
C’est à travers les mythes (anciens ou actuels) et légendes que je vais essayer de voir comment les hommes le voient.
Le « Mal Incarné », comment et pourquoi ?
Pourquoi toutes ces créatures maléfiques (auxquelles répondent les créatures du bien), au passage, notez que le mot « créatures » s’applique plus volontiers aux êtres mauvais que bons…
Pourquoi perd-il toujours dans les histoires alors qu’on a l’impression (qui n’est pas vraiment qu’une impression) qu’il triomphe toujours dans le monde réel ?
Mais, même les histoires savent qu’il n’est jamais définitivement vaincu.
Pourquoi ?
Parce que le Mal n’est pas un démon cornu planqué derrière un réverbère qui va sauter sur le premier passant innocent.
La mal est en nous, la notion chrétienne de « démon » l’extériorise avec celle de « possession ». Si j’agis »mal » ce n’est pas parce que je suis intrinsèquement mauvais, mais parce qu’un de ces démons s’est emparé de moi. Ce qui pose le problème de ma responsabilité, suis-je responsable de l’avoir laissé entrer ou est-il entré malgré moi ?
Le christianisme n’a pas inventé les démons « daimon » est une notion grecque beaucoup plus large.
« Démon » est une réduction qui ne conserve que l’aspect ombre et tentation, alors que le terme grec recouvre toutes les expériences humaines : théorie et expérience de puissances supra ou infra psychique : en gros ce qu’on nomme aujourd’hui paranormal, les contacts avec l’Autre Monde et les êtres qui le peuplent : esprits, anges, génies, démons, démiurges, djinns, chérubins, fées, etc.…) dont l’apparition peu signifier pour l’humain une rencontre avec son propre destin.
Il s’agit d’une dimension humaine essentielle de projection de la psyché, l’Eglise est hostile à ces manifestations, sauf quand les saints voient des anges ou la Vierge. Apparitions qui sont réservées à quelques rares privilégiées et doivent être approuvées par l’Eglise. Tout le reste étant pure imagination ou manifestation démoniaque.
Les dieux païens sont qualifiés de « démons » dés l’origine de l’Eglise, dans le sens malfaisants bien sûr.
Alors que le daimon n’est qu’une créature surnaturelle, pas obligatoirement malfaisante, pour tous les monothéismes les démons sont les suivants d’un dieu mauvais, Diable est le titre du principal d’entre eux.
Et la hiérarchie des êtres infernaux est calquée sur celle des êtres célestes.
Le Mal est en nous, et nous pouvons tous basculer du côté obscur.
Pourquoi certains succombent-ils et pas d’autres ?
Même en Avalon, on n’a pas toutes les réponses !
Comme disait ce cher Blaise : « l’homme n’est ni ange ni bête », juste un peu des deux, et il faut composer avec tous les aspects de la psyché…
Pourquoi tous ces monstres des mythes, contes, légendes, incarnations du Mal ? On finit par ne plus en avoir peur, si hideux, teigneux et puissants qu’ils soient, on sait qu’au bout du compte ils vont perdre.
Ils vont perdre parce que si des humains succombent à leur charme, d’autres résistent et c’est ceux là qui vaincront ! A de rares exceptions prés, ça finit toujours bien pour l’humanité !
Mais le combat n’est jamais fini.
Surtout ne pas s’endormir dans la félicité, il faut demeurer vigilant, la félicité c’est pour bien plus tard, au Paradis si vous l’avez mérité !
La tentation n’est pas qu’une notion chrétienne, même si le christianisme en use et abuse, surtout dans les hagiographies (mais le saint triomphe toujours !). L’homme ordinaire, lui, c’est une autre paire de cornes !
Les ermites s’exilaient volontairement au désert, pour échapper au « Monde » et ses tentations matérielles et charnelles. Avoir fait du sexe en tant que tel un mal, c’est très chrétien.
Mais, bien qu’il passe son temps à prendre des baffes et à se faire rouler dans la farine (ce que c’est rassurant) Satan ne s’avoue jamais vaincu.
Il envoie ses séides dans les retraites les plus reculées tenter les aspirants à la sainteté. Et quand c’est une grande âme forte (le trophée serait plus glorieux), il se déplace lui-même.
En bannissant tous les autres daimons, le christianisme a un peu beaucoup forcé sur l’Enfer (qui n’est pas une invention chrétienne, toutes les mythologies ont leurs Enfers.) ca a donné des visions artistiques sublimes ; de La Divine Comédie, très théologiquement correcte qui a elle-même inspiré la vision quasi définitive de l’Enfer ; au Jardin des Délices, triptyque dont on connaît beaucoup plus le volet Enfer que les deux autres !
Satan n’est pas plus une invention judéo chrétienne que le Prince du Mal.
Dans la mythologie babylonienne (et la Bible lui doit beaucoup, Abraham est originaire d’Ur en Chaldée) Satan, ou plutôt« les satans » c’est l’accusateur, celui qui pointe du doigt les tares et défauts des humains, met au jour les actes mauvais qu’il a commis. Pas confortable d’avoir ça à ses basques, l’image qu’il vous renvoie de nous n’est pas jolie/ jolie !
Dans le Livre de Job, Satan qui prend le thé avec Dieu, lui dit que tous les hommes sont faillibles, mais Dieu proteste que son serviteur Job est sans défaut. Avec la permission de Dieu, c’est très important : avec la permission de Dieu, Satan va tenter Job ; vous connaissez l’histoire ; lequel Job ne cède pas à la tentation de s’en prendre à Dieu malgré les pressions puis l’abandon de son entourage. Donc le Diable ne peut intervenir qu’avec l’accord de Dieu.
Notion cohérente si on admet que Dieu est créateur de toutes choses, mais très gênante car il aurait aussi crée le Mal ?
Alors exit les satans accusateurs et d’une certaines façons redresseurs de consciences, puisqu’en vous obligeant à regarder en face vos mauvaises actions, il vous empêche d’en commettre de nouvelles, c’est leur raison d’être!
Bienvenue à Satan, l’unique, Lucifer, Dité… Ses noms sont aussi nombreux que ses visages, il est responsable du Mal, il nous est extérieur, le Mal nous est extérieur, donc nous ne sommes pas responsables s’il nous possède ?
Mais Lucifer, l’ange de lumière d’avant la Chute, est: « le plus charmant et le plus beau des anges » c’est une créature de Dieu, et puisqu’il est beau, la tentation de lui céder est plus grande.
D’ailleurs la Bible est plutôt discrète sur les motifs de la disgrâce du chouchou du Créateur. Il s’est « révolté » pourquoi, comment ?
Créateur qui apparemment s’est planté puisque sa créature n’était pas parfaite, logique, y’a que lui qui soit parfait !
Alors pourquoi ce parfait a-t-il bossé sept jours pour créer des êtres imparfaits ? Ca répondait à quelle nécessité ?
II) L’ORIGINE DU MAL ?
Comment un dieu tout de bonté et de perfection a-t-il laissé le mal envahir ce monde qu’il a crée ?
Le Manichéisme à sa façon apporte une réponse :
Le monde matériel a été crée par un dieu mauvais (Ahriman), le monde spirituel par un dieu bon (Mani), et ils se combattent sans trêve. Le rôle de l’homme est alors de faire disparaître le monde matériel en ne succombant pas à ses tentations, notamment en ne se reproduisant pas.
D’où (comme titrait un film célèbre) « Dieu a besoin des hommes », ce serait pour ça qu’il les a crée ? Pour qu’ils s’autodétruisent en faisant disparaître le Mal ?
Côté autodestruction, l’homme n’a besoin d’aucun dieu, il fait très bien ça tout seul, le problème c’est qu’il y entraîne le reste de la création, et ça c’est mal !
Donc le mal serait en nous dés l’origine ?
Un dieu bon crée un monde spirituel et pur, un dieu mauvais vient y mettre son grain de mal pour gâcher l’ouvrage !
Un dieu peut-il être mauvais ?
Les païens ne se posaient pas la question. Les dieux étaient les dieux, des êtres dotés de pouvoirs surnaturels qui pouvaient faire à peu prés tout ce qu’ils voulaient, sans souci de Bien ni de Mal. L’homme, leur créature, n’avait qu’à les adorer en veillant à ne pas les fâcher, les pires supplices attendaient dans les Enfers grecs les contrevenants.
Les dieux grecs ne sont pas franchement sympas et les dieux celtes redoutables.
Mais pour ce qui est des Celtes et des Hindous les dieux fonctionnent toujours en triade, chacun ayant différents aspects, comme Civa, créateur et destructeur.
Toujours ambigus, ce qui est une vision plus saine que la frontière barbelée ; d’un côté le Bien, de l’autre le Mal. Pas de nuance !
Ce n’est pas si simple et le Mal il faut s’en débarrasser !