Quand la nuit se façonne

Il est d’autres endroits où la nuit se façonne à vos ébats de soi que le temps déraisonne.
A force d’aimer trop jusque tromper l’absence par quelques vers de trop aux rimes du silence, vous forcez l’utopie jusqu’à la déraison, dérobant à la nuit ses mots et ses frissons.
Je rêve ces endroits tout en rêvant à vous en songes maladroits où les cieux sont à nous et ne cesse d’aimer jusque tromper l’absence exquise à mon côté d’amour et d’indigence.
Je force la folie et viole ma candeur en écrivant petit comme fausse pudeur.
Mais si j’écris pour vous tandis que le mépris m’abandonne à genoux au pied de votre vie où trouverais-je enfin le mépris partagé des nantis clandestins qui se croient affamés d’être si mal aimés en cette Terre aride où la nuit façonnée est devenue rigide ?
Quand la nuit se façonne il est comme un usage de n’être plus personne et de tourner la page.

Il est d’autres chemins où le jour s’emprisonne en cédant du terrain à la nuit polissonne.
Les arpentant sans cesse au hasard des détours vous marchandez vos fesses en guise de séjour au premier mâle transi et à ses vœux lascifs pourvu que dans l’oubli il plonge son canif.
Je rêve ces chemins sans rêver la culbute où transie dans mes mains vous vous sentiriez pute puisque la vie sans cesse vous salit de désirs que vous n’avez de cesse en vain de reproduire.
Nous aurons beau forcer aux creux de l’existence, l’esprit ne peut lutter contre tant d’indolence.
Mais si j’écris pour moi tandis que le mépris vient clore le débat à toute poésie où trouverais-je enfin le mépris partagé des amoureux sereins s’affamant en secret, et comment peaufiner sans écrire je t’aime un écrit saturé de prose… ou de poème ?
Quand le jour s’emprisonne il est comme un ennui et l’humain déraisonne à réclamer la nuit.

Ça fait du bien de te relire.
Je t'aime bien dans ce registre en plus, et ça ne loupe pas : j'aime ce texte.

Au début je croyais des alexandrins, mais je me suis rendu compte que tu as même poussé jusqu'aux hexasyllabes, ou alors alexandrins avec rime à l'hémistiche, comme le sonnet que j'ai écrit récemment : Toi, cadavre.

Tu ne devrais jamais rester trop loin du Cercle, Épi. Merci d'y rester fidèle et merci pour ce beau texte

Au début, je croyais aussi, et j'ai commencé à relire doucement pour intégrer le rythme de ce très beau texte.
Mais non, tu mélodises d'instinct les textes, comme Monsieur Jourdain faisait sans la savoir de la prose.
Et ce rythme, ample et majestueux, égratigné parfois de tes mots blessés, me rend assez admirative.
Nuance cependant :
"...où la nuit façonnée est devenue rigide ?
Quand la nuit se façonne..."
La répétition du verbe alourdit l'ensemble, à mon goût.
Et :
"...à genoux au pied de votre vie où trouverais-je enfin..."
Un virgule entre -vie- et -où- me semblerait bienvenue.
Merci de ce plaisir.

ils sont beaux ces alexandrins. C'est quand même comme ça que la poésie respire le mieux et chante quand elle est versifiée.

Voilà une leçon de poésie.
(je parle pour moi bien sûr !)

Un façonnage nocturne bien ciselée, tu es trop rare Epy!

Surprenant –de se poser la question quand la créativité vient
le jour et l’emprisonne…


Et la nuit … ? « N’être plus personne »… ?


J’aime beaucoup « la
vie sans cesse vous salit de
désir »


Un vrai plaisir de te lire.

Cordialement Solweig

Bon. Je serais surprise de ne pas te l'avoir déjà écrit ; tes textes sont à dire, sur un fond musical très particulier. Au fond d'un cabaret, ou dans quelque endroit intimiste, mais au fond, à plein cru sous la lumière, ça le ferait aussi.

Encore du plaisir par ici. De déraison en déraison.
Un seul bémol à mon goût : l'usage excessif du mot "mépris".