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 Apologie sentimentale de l'échec. 1

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epiphyte
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MessageSujet: Apologie sentimentale de l'échec. 1   Apologie sentimentale de l'échec. 1 Icon_minitimeVen 18 Jan - 23:52



Parce que je n'arrive toujours pas à trouver ce qui me gène, et du coup à faire les corrections qui s'imposent pour enfin envoyer mon roman aux éditeurs, je vous livre ci-dessous le tout début, chapitre 1 et chapitre 0, en espérant recueillir vos impressions à ce sujet. J'ai déjà posté le premier chapitre à l'époque sur outre-rêve, c'était il y a un an, et il était deux fois moins long, moins travaillé aussi...
Merci d'avance d'être critiques, le plus possible, de manière à me guider à travers des mots que je ne maîtrise plus à force de les relire...


(PS : Je le fais en 2 fois parce que ça dépasse la longueur autorisée !...)





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MessageSujet: Apologie sentimentale de l'échec. 1a   Apologie sentimentale de l'échec. 1 Icon_minitimeVen 18 Jan - 23:55

0

Tout écrivain se met perpétuellement en scène à travers des personnages de fiction plus ou moins vraisemblables, quand il parvient à duper le lecteur sur ce point on lui accorde loisir de recommencer, on dit que l’écrivain a réussi.
Le court texte qui suit est mon autobiographie exhaustive, celle d’un écrivain raté.
Pour éviter le hors sujet, j’ai donc décidé de ne parler que de moi, sans masque aucun.


Toute ressemblance avec des personnes existant ou ayant existé n’est pas fortuite, car si je peux m’embrouiller avec certaines personnes de mon entourage qui se prennent pour des amis, ce sera une satisfaction supplémentaire à sa publication. Toutefois, à l’heure où j’écris ces lignes, je ne me suis pas encore décidé quant à l’utilisation d’un pseudonyme pour honorer ma veulerie.

Si vous avez acheté ce livre, vous vous êtes fait avoir. Ce n’est pas un livre qu’on achète, c’est un livre qu’on se fait prêter, car il n’a pas sa place dans une bibliothèque digne de ce nom, et vous savez comme moi qu’un livre qu’on prête est un livre qu’on ne revoit jamais.
Mais puisqu’il est entre vos mains, je vous laisse juger par vous-même, cela devrait vous laisser le temps de choisir avec soin la personne à qui vous le prêterez ensuite.



1

Ce n’est pas que je n’aime pas les chiens, je déteste les maîtres.
Si le chien n’a d’autre utilité que ramener des balles ou des morceaux de bois en remuant la queue pour amuser ses maîtres, c’est avant tout un animal malheureux qui se laissera balayer par le premier tsunami venu si son berger ne bronche pas. Le chien, quelle que soit son éducation, fait sa merde où on l’emmène la faire, et si elles s’entassent dans les caniveaux bien planquées entre deux pare-chocs et que les gamins glissent dessus et se pètent la gueule, c’est uniquement la faute de ces enfoirés de maîtres qui les y emmènent, le sac à caca bien à l’abri tant que personne ne les surprend, ramène la baballe et mords la vieille saloperie de clébard sinon tu vas tâter de ma semelle une fois de plus, mais qu’il est con, mais qu’il est con… Désolé si je m’emporte.
Calme.
Je n’ai pas d’enfant et n’ai pas envie d’en avoir, tel père tel fils, tel maître tel chien, si j’ai parlé des gamins c’est uniquement pour me donner bonne conscience dans un excès d’obséquiosité vis-à-vis du lecteur souvent attendri par ce genre d’attentions. En réalité je ne pense qu’à mes propres semelles.
Certes, si on me demande de choisir entre un enfant et un chien, j’opte pour l’enfant qui finira par déterminer seul les endroits où il voudra chier et qui pourra un jour rembourser sa bouffe en me payant la retraite, à moins bien sûr qu’il ne termine en prison pour avoir brûlé la voiture du voisin, ou son chien.
Bien fait pour le voisin.
Bien fait pour le chien du voisin.
Bien fait pour ce petit con de gamin que j’aurai mieux fait de promener en laisse plus souvent, avec un père alcoolique pas facile de se construire mais ça n’empêche quand même pas d’apprendre à remuer la queue, ramener les balles et mordre les vieilles, bordel de petit enfoiré de bon à rien…
Calme.


Je voulais commencer cette autobiographie d’écrivain raté paisiblement, en ne parlant que de moi avec désinvolture, espérant de ce fait retenir le lecteur hésitant dans les entrefilets de ma pensée féconde, comme le font toutes personnes qui n’ont rien à dire mais parviennent à vendre des bouquins sur leur simple nom.
Une fois de plus je me retrouve errant aux méandres d’une imagination sans limite, personne n’acceptera d’acheter un livre dont l’accroche n’est qu’une vulgaire merde de chien, l’ouvrage déjà reposé sur une pile immuable à l’arrière boutique des librairies deviendra au mieux cale pour armoire ou mange poussière.


Autobiographie d’un écrivain raté, ça ressemble à un paradoxe, mais, je ne vous le fais pas dire, à écrivain raté, autobiographie ratée. D’ailleurs toute ma vie est un échec, j’ai commencé tout petit en réussissant tout ce qu’on me demandait de faire, et vous savez comme moi que la réussite sociale est le plus cuisant échec à l’épanouissement personnel, le mien n’a pas fini de cuire.
Réussir à entrer dans les moules ravit l’entourage et comble autrui mais n’offre pas le luxe du rêve, de l’espoir, de la jouissance. La plupart des gens s’en accommodent, le vrai paradoxe en ce qui me concerne est finalement de commencer cette autobiographie le jour où je prends conscience de m’être trompé de rêve, comme si me détourner de l’écriture me permettait enfin d’assouvir le désir des mots.


Je ne serai jamais écrivain, c’est pour cela que je vous l’écris.
De toute façon je n’ai pas plus de nom que de nègre et ne peut compter que sur une imagination débordante pour noircir du papier au mépris de la sauvegarde forestière. Je voulais commencer cette autobiographie, je n’y suis pas parvenu, dans ces cas là, auteurs en herbe prenez-en de la graine, rien ne vaut l’aération spirituelle.
Je suis sorti faire un tour et n’ai rencontré que des chiens en laisse, entre deux voitures garées leurs traces m’ouvraient les voies impénétrables de l’hôpital, naturellement je n’avais pas prévu de vous en parler maintenant mais les esprits faibles se laissent souvent influencer par les insignifiances du monde.
J’en suis.
Je veux dire, en plus d’être alcoolique, sans enfant, sans chien, sans voiture, sans talent, et sans attache finalement sinon les souvenirs d’un passé trop étroit, je fais partie de ces esprits faibles qu’un rien suffit à détourner de l’existence. Heureusement du reste que l’esprit faible est influençable, sinon je serai retourné à ma bouteille plutôt qu’écrire, vous ne savez pas comment ça se passe mais je vous raconte.
On s’assoit devant la table, on prend une feuille et un stylo – pardon, vivons avec notre temps, on allume l’ordinateur et on prépare le clavier ; on tape deux mots, puis on se demande pourquoi écrire. On peut chercher des années, on ne trouve jamais la réponse. Certes, on en trouve. Des tonnes de réponses se pressent aux portes de l’esprit faible, qui les accepte souvent sans débattre et s’en contente jusqu’aux suivantes. Les esprits inférieurs aux esprits faibles finissent même par poser la question aux autres sans grand espoir, cherchant seulement à se rassurer devant l’incompétence du prochain, ce qui constitue une satisfaction en soi, tout de même. Les pires sont ceux qui ne vous posent jamais la question et tentent sans cesse d’y répondre dans leurs écrits, souvent sans en avoir conscience.


Combien d’écrivains sont héros de romans ?
Il faudrait que les littéraires se mettent aux mathématiques pour détourner les statistiques, ça ne ferait pas de mal à la création, ça permettrait surtout de faire du ménage dans les rangs des écrivains. Tellement de gens pensent écrire de nos jours qu’on finit par croire que tout le monde en est capable, ça me fait mal au cul.
Moi, par exemple, je ne suis pas écrivain, je ne serai jamais écrivain.
J’écris, c’est vrai, comme on écrit une lettre, une liste de courses ou un compte rendu de réunion, mais jamais vous ne me verrez me mettre en scène plus que nécessaire, jamais je n’aurai cette audace hypocrite de noyer mes questions existentielles dans une fiction plus ou moins maladroite. Je vous respecte trop pour cela, je me contente de raconter.


D’ailleurs plus personne n’écrit de lettre aujourd’hui, quelques irréductibles qui pètent plus haut que leur plume peut-être, mais à l’heure du message instantané sur portable, le mot qui vient de loin n’a plus aucun statut, plus aucun sens, aucune saveur, mâché par les claviers des téléphones, modernisé par la frayeur du temps qui passe, adapté aux douleurs de l’urgence.
L’homme s’adapte, c’est sa grande force, il a inventé les bottes pour éviter la merde qui colle aux pieds, saletés de chiens, saletés de maîtres, saletés de mômes qui marchent en tongs.


Dans un monde qui ne lit plus quand les trois-quarts sont illettrés, l’homme s’adapte et n’écrit plus. Il survole la merde en bottes étanches, laisse dormir le gosse dans la niche du chien, et brûle la voiture du voisin pour oublier qu’il n’en a pas lui-même. Le soir, rentrant fourbu de tant d’activités, il ouvre sa bouteille et s’installe devant l’écran de télévision, portable en main ouvert au menu de la messagerie instantanée, dépensant son fric à tort et à travers pour des merdes qui salissent moins.
Ceux qui n’ont pas la télévision ont un ordinateur, on y écrit sans orthographe pour faire semblant de communiquer, certains s’y trouvent des vocations et se prétendent écrivains. J’en ai longtemps fait partie, jusqu’à comprendre enfin qu’au lieu de me demander pourquoi écrire, il fallait que je me demande pourquoi dire que j’écris. Dans écrivain s’est écrit vain, même monsieur best-seller devrait y songer en comptant son pognon durement engrangé au fil des frappes au clavier.


Le véritable écrivain garde ses mots sans besoin de partage, car l’écriture est une activité solitaire qui puise au fond de l’être pour dériver jusqu’à sa surface, sans jamais chercher à rencontrer l’autre. La communication est un échange, essentiel à l’homme à partir du moment où il y a goûté, mais l’écriture est un acte égoïste qui n’a nul besoin de lecteur.
Il s’agit d’un autre plaisir égoïste que d’être lu, en pensant qu’on enseignera quelque chose de son expérience ou avec la certitude de paraître meilleur que son voisin, car ces deux sentiments sont les seuls susceptibles de conduire un texte devant le regard d’autrui. J’en suis persuadé car ce sont les seules raisons qui me poussent à vous partager mes états d’âmes aujourd’hui, vous en déplaise.
Ceux qui pensent se sauver dans l’écriture se fourvoient dans l’existence, on n’écrit jamais pour se sauver mais seulement pour voir jusqu’à quel point on est perdu, ce ne sont pas les mots qui nous apportent la réponse mais le regard d’autrui sur ces mots. Plaisir ou dégoût, tout n’est que provocation de sentiment, recherche d’échange, communication tu nous tiens !


Je crache mon dégoût de la merde de chien seulement parce que j’espère vous trouver en accord avec moi, je critique ma propre entame pour vous donner loisir de me critiquer à votre tour, et je ne fais que tourner en rond autour des mots, comme chaque fois, écrivain raté parce que je n’ai jamais fait ce qu’il fallait pour le devenir, laissant errer les mots sur mon existence passive.
Pourtant j’écris, sans duper personne, pour la jouissance du mot, en accord avec ma page vierge nous avons besoin de votre regard pour sublimer notre union, j’ai besoin de communiquer mais je n’ai pas besoin de vous pour écrire et me satisfaire, je ne suis pas écrivain.


J’ai longtemps brandi comme un bastion cette notion d’écrivain qui, pensais-je, me donnerait sinon prestance au moins crédit pour le semblable.
Que faire d’autre qu’écrire dans cette vie insipide si dérisoire ?
Au moins si j’avais un chien je trouverais intérêt à ramener l’argent de sa bouffe à la maison.
Au moins si j’avais cet enfant que je déteste surtout à ne pas exister je penserais à son avenir mêlé au mien.
Ou si je partageais l’existence de sa mère, vous savez, cette femme extraordinaire qui me donne envie de sortir du sommeil les matins brumeux, cette femme merveilleuse qui seule enchante mes nuits et dissipe mes doutes, la femme qui m’a fait comprendre que paraître n’avait aucun sens sans être, que vivre pouvait se contenter de vivre, ce petit bout de femme parfois chagrin souvent câlin qu’on veut serrer dans ses bras dès qu’on la voit tant elle nous a fait oublier le délire du mot, la femme que je voulais quand je serais grand et maintenant que je suis grand elle a compris avant moi tout ce que je m’étais interdit de comprendre et m’a laissé aux errances d’une enfance inachevée…
Calme.


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MessageSujet: Apologie sentimentale de l'échec. 1b   Apologie sentimentale de l'échec. 1 Icon_minitimeVen 18 Jan - 23:56

Se calmer quand on s’énerve, mais aussi quand on s’emporte, sinon écrire redevient ce stratagème douteux de communication, sitôt qu’on écrit pour être lu, on n’est plus écrivain mais le monde y croit si on le lui répète.
Je lui ai tant répété que j’ai fini moi-même par faire semblant d’y croire, pourtant je reste lucide et j’en prends de la graine à défaut de vous autres. Depuis ma tendre enfance, je n’ai jamais écrit que pour tromper la solitude, comme l’adolescent note dans son journal intime ses meilleurs moments pour le jour où tout ne sera que souvenir. L’écrivain du monde nous confie son journal intime et nous demande de le payer pour cela, ridicule. Pourtant, puisque ça marche pour lui, je ne vois pas pourquoi ça ne marcherait pas pour moi. L’aboulie m’a rendu heureux de n’être pas capable, de n’être pas heureux sans me pencher sur le bonheur à ma fenêtre.


La lucidité n’est pas le propre de l’esprit faible, j’ai dû me faire aider pour comprendre. Il fallait cette femme pour m’ouvrir les yeux, comme une mission achevée elle est partie pour un autre parce que je ne suis pas le seul débile sur cette planète et les missions de ce genre ne prennent pas une vie, mais la vie prend son temps.
Elle seule mérite mon amour en ce bas monde, car elle est la seule à avoir su me guider aussi bien, en refusant chaque jour d’accorder crédit à ce rêve d’écriture que je n’ai fait que survoler, elle m’a poussé à y voir clair, allant même jusqu’à me quitter pour qu’enfin je me remette à écrire, pensant niaisement me sauver, pensant enfin vivre des mots. Stratagème douteux s’il en est mais finalement plutôt efficace puisque me voilà trompant l’absence par le mot.


On n’écrit jamais que pour tromper la solitude, et si on s’y prend bien on finit par croire que cela pourra nous en détacher réellement, le regard de l’autre y contribue, la vie s’accélère en nous prenant par la main, la ronde folle des existences entremêlées s’emballe dans un sursaut d’orgueil commun, mais comme tout remède efficace, une fois le corps habitué il en faut toujours plus.
Rendons les mots à ceux qui en ont vraiment besoin, ceux qui croient qu’ils pourront y mourir, ceux qui croient qu’ils pourront y renaître. Ils sont nombreux.


Moi qui n’ai jamais rien terminé dans ma vie, moi qui n’ai même pas réussi à commencer une autobiographie correcte, je vous convie seulement à me suivre, moi qui ne vais pas loin, moi qui me contente de peu, moi qui baise avec ma page vierge seulement parce qu’elle est vierge, pour le plaisir du mot qui ne sera jamais mien, qui ne sera jamais votre. Le mot, seul, en ressort grandi, chaque fois sans me le dire, chaque fois sans vous le dire. Je ne ferai plus l’amour alors je baise les mots, trompant la solitude.

La solitude.

Tant de paumés en ont parlé pensant la transcender, mais comment pourrait-on ?
Le bourreau fatigué se trancherait-il lui-même la tête ?
Oui, j’avoue sous la torture, nous avons de beaux textes noyés de solitude, mais seul le mot y parle. Toujours lui. Le mot sur un divan semble moins seul mais reste le même que sur une page faussement péremptoire. Je dois écrire. Je dois écrire, il le faut, c’est la page qui le dit. Mais la page ne dit rien que je ne veuille, je suis son maître, j’étale ma propre merde là où ça me chante, tant pis si vous marchez dedans. Amenez vos enfants la prochaine fois, nul mot n’est interdit pour l’esprit qui s’éveille aux douleurs de ce monde.
La solitude.
Ce cafard immonde qui rampe sur vos murs sans assurance sinon rester.
On ne crée jamais sa propre solitude, ce sont les autres qui nous l’apportent, comme un proche emmènerait une inconnue lors d’un dîner entre amis ; qui sont vraiment vos amis ?
Cette inconnue sournoise ne se fait pas annoncer, elle ne se laisse pas servir, dans sa robe transparente c’est elle qui se sert en vous et reste au-delà de la soirée. Une fois les convives envolés vers un destin merveilleux, elle se fait une place à l’intérieur et prend possession des lieux. Peu à peu. Elle prend possession des lieux et des êtres qui croient y vivre.


C’est la solitude qui écrit pour moi, c’est elle qui me condamne en me donnant ce sentiment d’en sortir enfin, c’est elle qui vit pour moi et décide à ma place, elle qui dirige, elle qui me guide entre les immondices mais me pousse à y revenir quand je voudrais parler de moi.
Heureusement, elle ne corrompt pas le calme.
Heureusement, elle a mis des mots sur mon dégoût des chiens et des enfants, me donnant une fois encore l’illusion du pouvoir littéraire.
Heureusement, elle ne m’a pas conduit à détester la femme, vous savez, celle de quand je serai grand si j’y arrive un jour. Elle ne m’a pas poussé assez loin dans mes retranchements pour cela, elle a seulement pris sa place, un court instant peut-être, me dit une voix qui vient d’ailleurs.


La solitude s’est immiscée dans un espace que je pensais clos, aujourd’hui c’est elle qui s’est mise à vivre pour moi. Elle fume un paquet de clopes par jour, parfois sans ouvrir la fenêtre comme pour jouir de nuire à son prochain, je la laisse faire, en bon prochain qui se respecte. Elle s’est mise à boire sous mon toit comme si j’avais les moyens de subvenir à ses délires, je lui en donne les moyens puisant au plus profond de mes ressources. Elle s’est mise à tromper le mot comme si je pouvais me permettre aujourd’hui d’être enfin lucide sur ce que je suis, je la laisse faire parce qu’elle a raison.

Elle agit, je la laisse faire, elle a raison, sans cesse.

Elle m’allonge entièrement nu sur mon lit, la douceur des draps tisse un cocon de bien-être, je fais semblant de vivre. La lumière allumée pour mieux voir l’étrangère, qui se cache pourtant, mon sexe se dresse subitement, lui qui pensait ne jamais recouvrer ses capacités à engendrer du plaisir. Mon sexe se dresse et bien sûr c’est la solitude qui a joué des mains, dans une chambre étroite où seul le silence est passé maître, domptant la merde des chiens d’en face.
Je laisse faire.
Sans un mot elle se presse contre ce corps aride et lui redonne vie, sexe tendu vers un plafond obscur, les images des absentes se pressent à mon esprit, risquant de tout gâcher. Seule la femme de quand je serai grand a des droits sur ce sexe, mais la solitude sait tout de l’usurpation. Mon esprit faible revient vers elle, je me laisse emporter et je jouis sans les mots, fermant les yeux enfin.


Je ne peux plus les ouvrir.
Je ne peux plus relever ces paupières douloureuses.
Une pluie de merde s’est abattue sur mon univers et j’ai laissé faire les yeux clos, sans me protéger, sans broncher, sans enfant, sans chien, sans voiture, sans attache finalement sinon cette solitude trop étroite.
Calme.
Calme, mais rien n’y fait.
Le plafond est trop proche, la solitude s’en est allée ailleurs, dans le tumulte des villes elle est tellement plus forte, toujours plus loin, toujours présente.
Comment ouvrir les yeux, maintenant que je suis devenu grand ?
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MessageSujet: Re: Apologie sentimentale de l'échec. 1   Apologie sentimentale de l'échec. 1 Icon_minitimeDim 20 Jan - 0:10

Je l'ai lu, mais je ne peux donner d'avis comme ça, il faut que je digère, que je réfléchisse, et que je te donne un avis "motivé". Un peu de patience, donc...
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MessageSujet: Re: Apologie sentimentale de l'échec. 1   Apologie sentimentale de l'échec. 1 Icon_minitimeLun 21 Jan - 1:49

Merci, Constance... je saurai être patient.
J'ai l'avis de plusieurs personnes autour de moi concernant le roman en entier, mais votre avis d'auteurs et de lecteurs avisés m'importe davantage... le chapitre 1 est celui qui me pose le plus de problèmes en réalité, d'où mon envie de vous le donner à lire ici... J'ai déjà mon opinion, j'en attends juste d'autres pour me conforter ou non dans mes idées...
Patience donc... :-)
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MessageSujet: Re: Apologie sentimentale de l'échec. 1   Apologie sentimentale de l'échec. 1 Icon_minitimeLun 21 Jan - 11:25

Moi je vais imprimer, et le lire à tête reposée...
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MessageSujet: Re: Apologie sentimentale de l'échec. 1   Apologie sentimentale de l'échec. 1 Icon_minitimeSam 26 Jan - 14:40

Bon, je l'ai lu avec attention.

Dans ce canevas de désespérance romanesque, quelques phrases-joyaux se lovent, prêtes à nous prendre à la gorge, notamment lorsque tu évoques la femme ou la solitude.
Alors on a la gorge serrée.

Je n'ai pas aimé ton préambule (chap.0) et l'insistance ostensible et martelante avec laquelle tu veux ensuite nous (te?) convaincre que tu n'es pas intéressant, écrivain raté, d'une médiocre humanité, etc...
Auto-flagellation culpabilisante authentique ? ou hypocrite effet de style genre fausse modestie attendant la contradiction flatteuse ?
A mon avis tu joues sur les deux tableaux : tu te rapproches assez du mélancolique mortifère désespéré, mais conscient tout de même de tes qualités d'écrivain, et tu te joues de le nier.
Tu en fais un gimmick littéraire, et ma foi tu le fais bien.

Si la suite est consituée de la série des "Calme", l'ensemble risque d'être cohérent, et bien écrit, mais je préfèrerais moins d'ostensibilité à l'auto-dénigration.
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MessageSujet: Re: Apologie sentimentale de l'échec. 1   Apologie sentimentale de l'échec. 1 Icon_minitimeJeu 31 Jan - 0:18

Merci Filo, tes remarques rejoignent les miennes, il faut que je prenne le temps de corriger ce début de roman, car le reste me convient, mais je crois trop m'appesantir sur cet état d'écrivain raté, ça n'a pas vraiment lieu d'être, et c'est dérangeant pour le lecteur. Je vais m'y atteler prochainement... merci encore pour cette lecture...
Bientôt en librairie !...
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MessageSujet: Re: Apologie sentimentale de l'échec. 1   Apologie sentimentale de l'échec. 1 Icon_minitimeJeu 31 Jan - 0:32

Avais-tu posté cette première partie ? Il me semble que le premier texte que j'avais lu de toi, dans cette série "calme", comportait justement ce mot qui revenait plus souvent, comme un leit-motiv, et cela m'avait marqué. Peut-être s'agit-il d'un autre de tes textes...
Je l'ai lu attentivement aussi, plusieurs fois, et il me vient une question un peu bête : tu vas où comme ça ?
Je me rappelle de tous ces textes que j'ai lu de toi, chacun étant un véritable petit joyau, mais là tout à coup, je me demande ce que cela va donner en continuité, en un seul tenant.
Je verrai bien.
Je rejoins l'avis de Filo sur le problème de l'auto-flagellation. En écrivant comme cela, tu ne peux être un écrivain raté...
Vraiment bien fait, original et sincère. Parfois désabusé et douloureux. Mais l'observation est impitoyable, non dépourvue d'un humour froid. Et pourtant, l'humanité est là, je la sens frémir.
Et j'aime.
Constance, fidèle.
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MessageSujet: Re: Apologie sentimentale de l'échec. 1   Apologie sentimentale de l'échec. 1 Icon_minitimeVen 8 Fév - 1:41

Oui, j'avais posté cette première partie, mais elle a été retravaillée ensuite, elle était à l'époque beaucoup moins longue.
Je n'ai plus le courage aujourd'hui de retravailler le roman dans son ensemble, cela me semble n'avoir aucun sens.
Un premier roman qui sombre dans le pathos n'a rien d'un vrai premier roman, c'est ce qu'on découvre en général à la lecture d'autrui. Je l'ai pour ma part découvert lors de l'écriture et ai voulu en jouer... sans succès.
Bien sûr que j'écris avec un certain talent... sinon je n'oserai jamais poster mes textes au regard d'autrui... mais comme disait Brassens un don sans technique n'est rien qu'une sale manie... je ne suis qu'un maniaque de l'écriture, je ne trouve pas le courage de travailler pour donner un sens à tout cela.
Peu importe.
Merci d'avoir lu et relu.
Avec le temps peut-être...
Pour l'instant non.
Mais je me porte.
A+
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MessageSujet: Re: Apologie sentimentale de l'échec. 1   Apologie sentimentale de l'échec. 1 Icon_minitime

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