Ainsi parlait...

Ma plume vient de lever l’ancre.
Elle navigue sur ton front :
Sa vague est temps, mais sans affront,
Nourrissant le flot de son encre.

Ma plume, au souffle de ton nez,
Son inspiration recueille :
Ses hémistiches, sur la feuille,
Sont d’or puisqu’ils te sont donnés.

Ma plume savoure tes lèvres,
Qui lui offrent leur conjonction :
Elle est leur subordination
Dans la plus sublime des fièvres.

À ton oreille va son or.
Il y murmure à ton enclume
Des gérondifs charmants. Ma plume
En invente encor et encor...

Elle a rejoint ton cou de ouate
Pour y déposer vers osés,
Syllabes douces, pieds rosés :
Son carat devient lèvre moite.

Elle est dent d’or sur ton blanc sein,
Pour en mordiller l’épithète,
Puis bouche d’or lorsqu’elle tète
Le crêt du délicieux coussin.

Comme la blancheur de ton ventre,
Ma plume lèche le vélin
Impérial de l’îlet câlin :
Il bleuit en son épicentre !

Ma plume, sur le parchemin,
Comme sur ton dos blanc, célèbre,
Par un baiser chaque vertèbre :
Ses vers honorent ce chemin.

Pour le doux galbe de tes fesses,
Elle a son plus bel adjectif,
Pour leur césure, un substantif,
Un seul, pluriel, aimant : Caresses !

Ma plume ose un enjambement
Comme sur tes hanches si riches
De volupté : ses hémistiches
Sont un acrostiche d’amant.

Au pied du mont, elle s’immisce...
Tout son viril objet est bu :
Elle y découvre l’attribut
Du sujet du creux de ta cuisse.

Ma plume éveille ton désir
Avec sa syntaxe de flûte,
Elle offre son anacoluthe
Au gardien secret du plaisir.

Dès lors, son encre masculine
Syncope sa phrase : elle bout
Au feu divin du petit bout
De ta vérité féminine.

Ma plume rime avec émoi
Quand nos pronoms dans l’âtre fondent,
Quand nos personnels s’y confondent
Pour renaître en un « TOI-ET-MOI ».

Ma plume va finir ses courses
Amoureuses sur tes petons :
Ses pieds s’envolent en festons
Pour aller rimer dans les ourses !

gepetto

Prophète Nombre de messages : 4029 Date d'inscription : 07/07/2007

Délicieux moment de volupté et de raffinement.
Elle a bien de la chance, l'"objet du désir" en question !
J'adore : "ses hémistiches
Sont un acrostiche d’amant".

Maître Nombre de messages : 1711 Age : 76 Date d'inscription : 09/07/2007

Superbe conjugaison d'une grammaire amoureuse.
Oui, l'"objet" a bien de la chnce, mais chaque femme peut y voir un hommage à LA FEMME.
Merci pour elles.

Une impeccable leçon de prosodie ET de poésie !
Tout y est : la métaphore, tenue d'un bout à l'autre, les assonances, les correspondances, les octosyllabes qui se marient si bien avec la poésie amoureuse, les rimes presque toutes riches, et embrassées s'il vous plaît (bien sûr), et surtout... surtout la délicatesse de l'auteur.
Chapeau bas le poète.

» Quand le monde parlait.
» Ainsi parla Zarathoustra.