Vin du Diable

16/02/08






Le Diable est tavernier rue des Mauvais Garçons,
Trinquons avec ce séduisant vaurien.
Choquons les pots d’étain sur les tables branlantes,
Où l’ivresse a versé d’élégiaques insomnies.

Le Prince des Démons est un hôte charmant,
Il laisse les poètes déclamer tout leur soûl.
Et risquer aux dés en riant aux éclats,
La potence de Villon, les poignards de Marlowe.

Satan affûte les plumes, les trempant d’hypocras,
Pour signer à jamais des pactes oniriques
Avec des muses gaillardes faussement alanguies,
Aux bras de leurs amants, volages coureurs de rêves.

Lucifer, du flacon, fait couler la lumière,
Etoile qu’on veut déchue dont les ailes palpitent.
Tour à tour ribaude ou princesse lointaine,
La femme dans ses bouges reçoit de verts hommages.

Le maître des enfers, généreux échanson
Régale tous les damnés brûlant dans les Index.
Maldoror partage la coupe de Sapho,
Rimbaud distille l’absinthe de sa folle saison.

Le Malin alchimiste sait mêler savamment,
L’hydromel pour tracer des vers enflammés,
Au désir d’absolu dans une orgie de rimes,
Où bardes et trouvères forniquent avec les anges.





Au cours de mes récentes recherches, je suis tombée sur cette sentence couperet de St Augustin: "La poèsie c'est le vin du Diable".
En sorcière qui se respecte, j'aime bien le Diable...

Marlowe Christopher: poète et dramaturge anglais (1564/1593) auteur de La tragique histoire du Docteur Faust, tué au cours d'une rixe dans une taverne.

Pour les non parisiens, la Rue des Mauvais Garçons existe, IVème arrondissement, dans ce qui fut le périmètre de la Cour des Miracles.

Magnifique, Morgane ! j'aime beaucoup la rigueur et l'inventivité de ton texte, c'est à la fois séduisant et savant, sans emphase.
Si la poésie, c'est "le vin du Diable", je sens que je deviens complétement alcoolique... que dis-je, intoxiquée.
Sinon, la rue des Mauvais Garçons, c'est mon quartier ! Une minuscule petite rue, entre Rivoli et la rue de la Verrerie. Ce qui est marrant, c'est que juste en face, à l'angle des rues, il y a "le quetzal", le plus ancien et sans doute le plus célèbre bar homosexuel de Paris.

"Où bardes et trouvères forniquent avec les anges."


Quel tableau!

Bel exercice de poésie référencée, on y sent bien la passionnée d'histoire.
L'ambiance est tout à fait adaptée au propos, et même visuelle.
J'aime particulièrement la dernière strophe (avec deux m à savamment stp). Dans la première, je suppose que tu voulais dire "trinquons" et non "triquons" ?

Fautes corrigées, Filo. Grr... J'ai beau me re relire...
Le lapsus orthographique sur "trinquons" est peut être révélateur vue l'ambiance... Lol!
Constance, je ne savais pas pour le bar homo, mais quand le Diable s'en mêle, tout est possible.

Moi j'aimais bien "triquons"!

On en laisse tous, des fautes. Sauf peut-être Filo, qui a un correcteur d'ortographe intégré (il s'est fait greffer une extension Mac...)
Sinon, j'aimais bien "triquons" aussi. Je te dis pas le lapsus !
Pour le bar en question, il parait que les nouveaux venus doivent embrasser les fesses d'un buste (une statue d'homme du cou jusqu'en haut des cuisses) la première fois qu'ils viennent dans ce bar. J'ai vu la statue en question par la baie vitrée, mais je ne confirme pas le reste : si je me pointe, je me ferais mal voir, les habitués n'apprécient pas que les femmes entrent chez eux.

Le Diable, Le Prince des Démons, Satan, Lucifer, Le maître des enfers, Le Malin alchimiste – quelle liste de présence !!

Un poème satanique qui nous grise de son vin. On en boit tous ici…
N’est-ce pas Méphisto ?

Cordialement Solweig

Solweig, les périphrases pour désigner le Diable sont trés nombreuses, une superstion veut qu'on ne prononce pas son nom de crainte qu'il n'apparaisse dans l'instant. je n'ai fait que puiser dans cette liste en choisissant les appellations plus "positives" parce que mon diable est plutôt bon bougre.
Ici en Bretagne il existe maintes recettes pour l'appeller si tu as besoin de ses services, services dont on connaît le prix... Mais "Poldick" selon son nom breton plutôt affectueux, se fait souvent avoir par plus malin que lui.

Aprés moult hésitations, et constatant que celui auquel je pensais, finalement je l'ai pas posté sur le Cercle, je renouvelle mon hommage à Lucifer!

Up de Noël 2009

Bon choix Morgane !

En le relisant, je m'aperçois qu'un vers sur trois est un alexandrin ; ça aurait été pas mal d'uniformiser la métrique, vu que tu présente ton poème sous forme classique. Mais bon, comme il n'y a pas de rimes non plus, la réécriture changerait trop l'ensemble.
Reste la solution que j'aurais personnellement préférée, c'est à dire une présentation en prose, sans pseudo-vers ou strophes.
Épiphyte nous a montré récemment combien la prose poétique est aussi efficace sinon plus lorsque la forme est oubliée et laisse le fond prendre les rennes.

Je me disais aussi que tu aurais pu inclure Omar Khayam, grand poète du vin.

Les alexandrins, c'est pas exprès! j'ai renoncé, sauf exercice de style imposé (à propos ça fait un bail qu'on a plus défi sur le cercle), je compte pas les pieds parce que quand j'essaie je me plante!

La prose poètique pour l'instant, je sais pas faire, faudrait que je m'y mette! Avec un autre sujet, je peux essayer, pourquoi pas? Même si j'ai pas d'idée là!

Omar Khayam, je connais pas, mais là aussi, pourquoi pas, j'ai des projets (secoue ton chaudron Morgane et ne reste pas au projet) sur ce qui se mange ou se boit, j'ai ébauché avec le thé et les pommes, je pense au pain, le vin pourquoi pas?
Des pistes pour écrire en sortant de ma routine... Manque l'implusion...