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 La Mode sous l'Occupation

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2 participants
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Morgane
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Morgane


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Age : 76
Date d'inscription : 09/07/2007

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MessageSujet: La Mode sous l'Occupation   La Mode sous l'Occupation Icon_minitimeLun 30 Nov - 20:59

Constance en avait parlé ici, j'ai donc profité de mon séjour à Paris pour aller voir.
Je vous livre mes impressions.






ULTREIA III)

LA MODE SOUS L’OCCUPATION



Musée de la Résistance Jean Moulin ;
Un tout petit musée, il faut vraiment savoir où il est. Perché dans les « Jardins de l’Atlantique » tout au dessus de la gare Montparnasse.
On se dit au passage que la résistance méritait sans doute mieux (c’est pas une critique contre le musée lui-même), quand tant de futilités sont exposées dans d’immenses espaces plus accessibles…

Futile, justement, se préoccuper de mode quand la France occupée par l’Allemagne nazie voit toutes ses ressources saisies par l’occupant. Des ressources qui vont nourrir l’Allemagne et soutenir son effort de guerre contre les alliées.
Je ne savais pas ce que j’allais trouver exactement, ni surtout que j’en ressortirais étreinte d’une émotion poignante.

Alors, la « Mode sous l’Occupation », c’est quoi ?
Comme son intitulé l’indique : des vêtements, des chaussures, des sacs à main, des accessoires…
Ces choses de la vie de tous les jours qui nous sont si quotidiennes, si banales. On voit une robe, des pompes, un manteau dans une vitrine, on se dit « pas mal », on entre, on essaie, si ça va on sort avec.
Un geste banal, ordinaire, on le fait sans y penser.
Sauf que…
Sauf que pendant l’Occupation, ce n’était plus du tout quotidien ni ordinaire, c’était devenu tout simplement impossible !
Impossible parce que tissus, laine, cuir… aussi faisaient partie des produits prélevés par l’occupant. S’habiller- comme manger- devenait un casse tête, il fallait des tickets et on n’était pas certain de trouver ce qu’on voulait, pas même les produits de première nécessité. Une paire de galoche par an et par personne, fallait pas user trop vite !
Etre vêtu avec décence relève de la dignité.
Il a donc fallu inventer des moyens, trouver d’autres matériaux pour fabriquer ces vêtements.

Et l’imagination n’a pas manqué.
On a eu recours au bois et au liège pour les semelles de chaussures, au liège toujours pour des vestes et des manteaux, au papier, au carton pour les vêtements. Le grand boom des textiles et matières synthétiques, c’est après la guerre, et c’est la guerre qui a poussé à les développer.
Faute de bas (en soie, les nylons arriveront à la Libération avec les américains), les femmes se teignaient les jambes avec du thé. Les plus raffinées allant jusqu’à reproduire la fameuse « couture. » Couture que j’ai haïe lorsque j’ai porté mes premiers bas, jamais pil/poil droite !
Aussi je me suis jetée avec délice sur les « sans » dés qu’ils se sont généralisés !
En y repensant, j’ai mesuré ce que signifiait avoir le choix, pouvoir faire la fine bouche sur un produit, être libre de décider ce qu’on va mettre !
Les femmes- si la mode masculine est évoquée, c’est la féminine qui tient la plus grande place- de 40 à 45 ne l’avaient pas le choix.
Cette imagination déployée pour simplement s’habiller sert aussi une forme de résistance : mine de rien le bleu/blanc/rouge est très présent, jusque sur les boutons qui s’ornent anodine ment d’une Croix de Lorraine.
J’ai pensé aux syndicalistes de Solidarnosc qui arboraient une résistance électrique en broche, rien de subversif, le symbole de leur profession : une résistance !

Une femme a passé toutes les années d’occupation à broder un chemisier blanc de phrases en bleu et rouge, de la devise nationale aux vers de la Marseillaise, entremêlés de symbole de la liberté. Elle ne l’a porté qu’une fois : le jour de la Libération de Paris. Une façon de vivre, de s’accrocher, d’espérer, en brodant…

Les sacs à main, souvent confectionnés en chute de tapisserie, ou en carton mâché, avaient parfois un double fond qui permettait de transporter de petites armes ou des tracts en faveur de la Résistance.
On dépasse de très loin la « Mode » en tant que telle pour parvenir à une façon d’être, un défi permanent entre la survie et une forme de résistance, préserver sa dignité, refuser de couler. Une façon de dire « Non » !

Bien sûr, les Maisons de couture, celles qui n’avaient pas été fermées pour cause de « juiverie » n’ont pas dédaigné la clientèle des dignitaires nazis, faut que le commerce tourne, et les mannequins continuaient à défiler. On voit des photos entre autre du Grand Prix de Longchamp, qui autant qu’une course de chevaux est une expo de chapeaux chics ! Mais cette mode sous l’Occupation, dépasse de loin le domaine luxueux de la Haute Couture.

Ce qui m’a le plus interpellée dans cette expo, entre sacs à main, robes, manteaux et accessoires, c’est un montage de film qui montre bien la dualité de la situation, c’était même encore plus complexe que « dual ».
Un film de propagande style Leni Riefenstahl la cinéaste égérie d’Hitler.
On y montre les « bienfaits » de l’Occupation, une jeunesse « saine » qui travaille aux champs, fait du sport, dans la joie et défend un idéal…
Commentaire dithyrambique à l’appui, avec cette voix, oh, cette voix… mécanique, impersonnelle qui vante tous les avantage d’une France purifiée confiante en sa jeunesse enthousiasme la portant vers des lendemains radieux. L’occupant, dans son infinie magnanimité, permet à la France de faire émerger son meilleur, d’échapper à la décadence.
J’ai dit de cette (ces, mais à l’entendre, on a l’impression que c’est toujours la même) voix off qui accompagne ce genre de film qu’elle est « mécanique, impersonnelle » mais c’est faute d’autres mots. Peut être aussi est ce du aux moyens techniques de l’époque, des années plus tard on retrouver le même ton un peu grandiloquent dans la bande son des « Actualités » qui faisaient la première partie des séances de cinéma.
Mécanique, impersonnelle, … des gens aux ordres qui débitent, des voix sans nuance, sans timbre, sans chaleur qui font froid dans le dos et donnent envie de se boucher les oreilles…
Mais comment pouvaient-ils réciter cette propagande, comment pouvaient-ils (ce sont toujours des voix d’hommes) ne pas Voir ce qui se passait, ne pas voir le vrai visage de ce qu’ils vantaient ? Des voix sans âme parce ceux qui parlaient ne parlaient pas par eux-mêmes, ils déversaient la bonne parole !
Mais en contrepoint, en haut de l’écran, défilent des lettres et des chiffresblancs sur fond bleu : ceux de l’action des résistants, des actes de sabotage des « terroristes », des fusillades d’otages…
Deux France qui s’opposent- et le contraste entre la propagande mécaniste du film, la voix inhumaine et ce bandeau qui « dit » est saisissant dans le raccourci- celle qui accepte et s’aplatit, celle qui refuse et se dresse.
Et, entre les deux, ceux et celles qui essaient tout simplement de vivre, pour ne pas dire survivre, et dont la vie est montrée au jour le jour par le biais de ces objets de « Mode ».

C’est ça qui m’a le plus remuée !
La grande gueule qui hurle volontiers contre la veulerie des masses pendant cette période est ressortie avec plein de questions, avec dans la tête et le cœur des « Vrais gens », si proches, des gens comme vous et moi, ni salauds ni héros, nos parents pour ceux de ma génération.
Des gens ordinaires qui ont pour certains su faire de cette quête du quotidien dans un pays qui ne leur appartenait plus, une forme de Résistance !
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constance
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Nombre de messages : 4029
Date d'inscription : 07/07/2007

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MessageSujet: Re: La Mode sous l'Occupation   La Mode sous l'Occupation Icon_minitimeLun 30 Nov - 23:28

Je t'ai dit sur un autre forum le bien que je pensais de ce beau reportage. Je renouvelle ici.
Vraiment très bien écrit, et surtout tu as clairement fait ressentir l'émotion qui peut nous saisir face à ces témoignages vivants d'une époque pas si révolue.
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http://eaux-douces.bloxode.com
 
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