Le sommeil de Chani

Au moment où je trace ces mots
sur le silence
de ma nuit blanche
les planètes et les heures
s'effeuillent dehors
continuent leur course effrénée
emportant le monde
et le passé
à jamais

Au moment où je change
cette feuille blanche
en support unique
de ma déraison sereine
je sais que tu dors
emportant l'immonde
et les pensées retorses
malgré le grondement
impératif mais vain
de la tempête

Pourquoi l'orage me rappelle toujours
cette nostalgie de l'enfant
que j'ai tant chérie et protégée ?
Les éléments doivent être conducteurs
de mélancolie
le temps d'égrainer les secondes
entre l'éclair et le tonnerre
entre la petite fille et la femme
entre l'espoir et la fierté
entre l'innocence et la sapience

Au moment où la foudre déchire cet instant
la lumière hésite et la rumeur gronde
Mais je sais que tes yeux sont clos
sur ton sommeil paisible
Je sais comment tu dors
et dort avec toi un peu déjà
celui que tu porteras
et qui peut-être me ressemblera

Ah, la nuit, quelle inspiratrice. Ton ton diffère de l'habitude: moins ramassé, plus simple. J'aime autant.

Cinq heures du matin, l'heure difficile, celle où la nuit hésite à s'achever, celle où le jour encore ne se décide pas à nous délivrer des nos insomnies.
Et dans cette nuit, dans ces élèments déchaînés au dehors, tu as puisé cet instant si profond et si doux. Connaissant l'objet de cet amour et de cette fierté, je ne m'étonne pas que tes pensées soient allées vers elle.
Le temps passe, et je crois que tu as parfaitement exprimé à la fois la nostalgie et l'espoir que recèle cette fuite des années. Pour ceux qui gardent l'espoir, bien sûr.
Je ne sais pas pourquoi, je me sens assez émue de lire un poème de toi que je ne connaissais pas, et qui, Geho l'a bien remarqué, s'éloigne un peu de ce que j'avais lu avant. Tout en te ressemblant, malgré tout, dans cette vulnérabilité que tu transformes en force terrienne.

Merci vous.
Oui Constance, tu ne pouvais pas le connaître, puisque je l'ai écrit pendant un gros orage qui s'est abattu dans notre région la nuit d'avant.
Ça faisait longtemps en effet que je n'avais plus écrit un texte de ce genre (que certains qualifieront de poème).

Et plus simple, oui, car plus le temps passe, plus je vais au plus simple.

Je suis sensible à ce parallèle entre le monde et l'immonde, celle qui dort paisiblement portant la vie, alors que le chaos dévaste.