C’est aux instants de rage et de mélancolie
Que la plume sauvage embrasse la folie
En se jouant du mot affable et prétentieux
Comme un souffle nouveau à tous les silencieux
Hurlant enfin l’amour, le sexe et le désir,
Et la mort tout autour pour mieux s’y divertir.
Tromper la solitude aux encriers du temps
En noyant l’amertume à des vers décadents
Où le mot peut renaître et s’en aller serein
Plutôt que de paraître en feignant le dédain
Quand il faudrait hurler la rage et la folie
Les mots se sont talés et les encres taries.
L’illusoire beauté d’une métrique exquise
A tout enraciné en marge des promises
Et cette rage sourde, aveugle et volontaire,
Est devenue trop lourde à l’auteur qui s’affaire
Si mal en vérité n’osant plus la défaite
Aux mots désabusés amputés de prophète.
Le cœur a ses raisons que l’encrier ignore
Et toutes soumissions se noient au sémaphore
Isolé du nanti soudain si vulnérable
Tandis que son esprit redevient misérable
A se conter aux gueux au mépris des usages
En faisant des envieux à pisser sur les pages.
Peu à peu, sournoisement, le cœur se liquéfie,
Et le combat d’antan vient y noyer l’esprit
Pour que vivent les mots sans peur et sans raison,
Sans juge, sans fardeau, et sans condamnation
A ces corps mutilés qui respirent sans cesse
En se pensant armés de pudeur et noblesse.
Pourtant c’est le désir qui féconde l’écrit
En offrant son plaisir au cœur et à l’esprit
Et quand tout se déchire au combat quotidien
Ne restent que soupirs aux encriers malins
Hurlant enfin les mots de l’indicible nu
Où l’homme est un salaud à se croire invaincu.
Bousculant la métrique en guise d’oraison
L’auteur se fout la trique à toute pendaison
De sa triste indigence aux marges des absentes
Tandis que l’insolence envie les innocentes
Et tout hurle à la fois au silence inspiré
Tandis que le combat livre ses condamnés.
Tout est perdu d’avance à déchirer l’espace
Aux promesses d’enfance et aux aigris qui passent,
Ecrire ne sert rien sinon pleurer peut-être,
Sans larme sur les mains, sans regard aux fenêtres,
Mais vivre pour écrire en hurlant sa détresse,
Au meilleur ou au pire, c’est battre sa faiblesse.
On ne combat pas ses faiblesses,
On vit avec.